Cela va de soi, la pensée ne chemine, ne se propage pas d'une façon continue de l'un de ces stades à l'autre . Elle emprunte, elle suit, l'un de ces modes, de découverte , d'illumination, puis revient à celui-ci pour passer à celui-là, avance, recule, se testant, se contrôlant au fur et à mesure . En sorte que , dans la réalité, les moments consacrés à l'élaboration, l'édification de l'hypothèse : les suppositions, et ceux consacrés à son contrôle, aux vérifications, sont étroitement entremêlés, enchevêtrés . Cette élaboration et ce contrôle forment comme les deux temps d'une continuel va et vient si les interactions construites sont efficientes (conduisent et créent des contestes et des savoirs nouveaux) .
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Ce mouvement général de la pensée est caractérisé encore par des périodes d'activité et des périodes de passivité .
Parfois, en effet, l'être pensant déclare chercher, chercher à comprendre, observer, établir des rapports, se mettre à la place d'un des personnages jouant un rôle dans le problème (pour savoir ce qu'il aurait fait à sa place ), comparer, chercher la cause ou la conséquence d'un événement donné, raisonner, déduire (tirer des conséquences), inventer .
Parfois, au contraire, il a le sentiment que les idées surgissent toutes seules dans sa tête, sans qu'il n'y soit pour rien, sans qu'il sache d'où elles sont brusquement venues .
Parfois, l'idée, bien qu'ayant apparu spontanément, est justifiée rationnellement après coup .
Parfois enfin, la pensée est comme arrêtée, suspendue, bloquée ; l'être pensant déclare qu'il ne pense à rien, ne trouve rien, n'est plus même capable de chercher, que son cerveau est comme paralysé, "vidé" !
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L'élément le plus fréquent qui se dégage de nos investigations, de nos constats, c'est la relation étroite , singulière, qui existe entre la perception et la pensée : la pensée est un substitut de la perception . Cela signifie qu'elles varient en raison inverse (rapport de deux choses dont l'une diminue dans la même proportion que l'autre augmente) l'une de l'autre .
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La pensée naît donc, émerge de la situation d'insuffisance de la perception ; elle apparaît, elle se fait jour du doute, de l'interrogation, de la perplexité, des incertitudes dans laquelle nous place, nous abandonne à l'indigence , la pauvreté du contexte présent qui est mis à notre disposition, disponible .
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Dans la perception, ce sont surtout les représentations sensibles et spatiales qui viennent enrichir les impressions données ; dans l'interprétation, ce sont des représentations affectives et abstraites qui les pénètrent et leur donne un sens .
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Cette réflexion se révèle constructive car elle nous montre bien l'interprétation, insuffisante, qui se prolonge dans la question, et la question à son tour qui pousse l'esprit à prendre conscience de certains détails, qui n'avaient pas été suffisamment enregistrés par la perception immédiate.
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En effet, lorsqu'on observe un personnage dans un groupe, nous savons, nous notons que c'est "d'après l'expression du visage " qu'il juge que telle personne est entrain de parler de lui . Mais, pourquoi n'a -t-il pas saisi tout d'abord, dans une perception immédiate, le sens de cette expression ? Pourquoi avait-il cet air interrogateur et s'est-il demandé à lui-même ce que la personne "semblait dire" ?
Nous pouvons répondre à cette question de trois manières différentes car il existe plusieurs possibilités :
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-1- On peut supposer que le hasard des tâtonnements de l'observation primitive n'avait pas porté sur elle l'attention du sujet ;
-2- On peut supposer également que cette expression de la physionomie de cette personne n'était pas assez significative pour avoir participé à l'acte de perception ou d'interprétation immédiate ;
-3- On peut enfin supposer qu'une absence de question précise, au début de l'observation, n'avait pas dirigé l'attention de ce côté (la perception, c'est connu, est en étroite corrélation, interdépendance, avec l'intérêt du moment ) . Des faits de ce genre, (nous en verrons beaucoup d'exemples par la suite), montrent que tout arrêt dans le développement de la perception immédiate incite le sujet ou à observer à nouveau, avec plus d'attention, ou à mettre en branle (en mouvement, à rendre opérationnelle ) sa pensée . Le plus souvent d'ailleurs, cette reprise de l'observation est précisément accompagnée de question, de réflexion, de pensée .
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Ces considérations nous montrent bien le rapport existant entre la perception et la pensée, celle-ci naissant de celle-là pour se développer peu à peu en jugements et en raisonnements .
Comme le raisonnement , la perception est une connaissance indirecte et immédiate, dans laquelle nous allons au-delà, par un acte de notre esprit,de la limite de notre expérience actuelle.
Comme la perception, le raisonnement est "une synthèse d'images", l'application d'un souvenir à une donnée nouvelle ; dans l'une et dans l'autre, il y a "transition d'un fait connu à un fait inconnu" par le moyen d'une ressemblance .
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Voici de la matière (des connaissances) pour "meubler", enrichir notre esprit et notre réflexion .
A bientôt, Gerboise
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