dimanche 28 juin 2009

Pourrions-nous nous demander*quel rôle, ont joué dans la recherche de la vérité l'écriture et l'imprimerie,qui sont, comme le langage**(1ère partie).

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* et essayer d'y répondre bien sûr !

** l'ensemble des inventions innombrables imitées, transmises, socialisées .


L'ÉCRITURE créa des objets parlants .

L'IMPRIMERIE les multiplia à l'infini et les éternisa .

L'espace, le temps, la mort, toutes les frontières de la connaissance , furent vaincus par la pensée .

Le LANGAGE , l' ÉCRITURE, l' IMPRIMERIE , ce sont là de merveilleux instruments créés par la pensée , pour la pensée .

Le LANGAGE , Le LIVRE , Le JOURNAL , ce sont trois " dimensions " de l'Evolution de l' Humanité qui, logiquement enchaînés entre eux, représentent de décisives étapes d'un équipement intellectuel lié au développement mental .

Nous verrons de quelle importance est cette invention première du langage articulé qui, avec la main, véritablement, a fait l'homme : invention d'une singulière efficience ( qui produit un effet, cause efficiente à distinguer de la cause finale) pour agir et pour connaître en coopération avec autrui . Mais verba volant, scripta manent (les paroles s'envolent, les écrits restent :proverbe latin conseillant la prudence dans les cas où des traces écrites peuvent être dangereuses ) :

" L'époque de l'invention de l'écriture, a dit Antoine Cournot (mathématicien, économiste et philosophe français, 1801-1877, spécialiste du calcul des probabilités, il a formulé une conception probabiliste et relativiste de la connaissance ; sans nier la notion d'ordre dans la nature et l'histoire, celle-ci fait une place importante au hasard, défini comme l'intersection de séries causales indépendantes, et propose une classification des sciences qui insiste sur leur irréductibilité [ Traité de l'enchaînement des idées fondamentales dans les sciences et dans l'histoire, 1861] ) , peut être regardée comme l'époque critique dans l'histoire de l'esprit humain " ( Essai sur les fondements de nos connaissances, 1912 ) .

Jacques de Morgan (archéologue et préhistorien français, 1857-1924, ) dans l'humanité préhistorique, a sommairement exposé les premiers essais de " figuration de la pensée " , depuis le simple dessin jusqu'à la conception de l'alphabet, dans les foyers de civilisation " d'où la lumière s'est répandue sur le monde entier " ( " La première écriture n'est que la représentation des objets ; la seconde est l'image des syllabes qui forment le nom des objets ; la dernière, la vraie, celle des sons élémentaires qui sont dans ces noms " , Paul Lacombe, [De l'Histoire considérée comme science] ) .

Cette invention ~ tardive ~ de l'écriture, en même temps qu'elle matérialise la pensée, réalise une extériorisation de la mémoire, ~ précédée, sans doute, de moyens mnémoniques divers, ~dont on ne saurait exagérer la portée ( " L'importance de la langue écrite a été de tout temps sentie par les hommes . A l'origine, ils attribuèrent l'écriture à une inspiration divine. Les Hébreux crurent que Moïse l'avait reçue de Dieu même ; les Égyptiens l'attribuèrent au dieu Thoth... ; les Grecs égalant l'invention de l'écriture à la pratique de l'agriculture ou à la découverte du feu, élevèrent Cadmus au rang de Triptolème ou de Prométhée " [Vendryès] ) . Sans elle, l'humanité ressemble à un homme qui ne se souvient pas du tout, ou, ce qui est pis (pire, le plus mauvais) , peut-être, se souvient inexactement de ce qu'il a fait la veille .

L'écriture est la mémoire solide du genre humain .

Sachant ce qu'on fait et d'où on vient, on pourra un jour savoir où l'on va et ce qu'il y a à faire .

La conservation désormais possible des faits politiques est bien quelque chose ; mais ce qui est infiniment plus influent, c'est la possibilité de conserver les observations, les découvertes ou les réflexions des hommes exceptionnels dans les sciences et dans les arts .
L'humanité est maintenant en mesure de commencer son encyclopédie, qui jamais ne sera close .

De l'écriture à l'imprimerie , il n'y a qu'une différence de degré dans la puissance des moyens de fixation et de diffusion de la pensée .

Cependant des siècles séparent de la première la seconde invention .

Le résultat de celle-ci est prodigieux : voilà, dans la mesure où l'humanité dispose de la durée, la pérennité (la continuité, état, caractère de ce qui dure toujours) assurée aux productions de l'esprit ; voilà l'élargissement sans limite, pour le penseur, le savant, le poète, du cercle des lecteurs possibles, et ainsi des disciples, des collaborateurs à l'oeuvre collective ( sur les conséquences pratiques de toutes sortes, économiques, politiques, morales, juridiques [la loi écrite] , même affectives, à la fois de l'écriture et de l'imprimerie , " La responsabilité humaine n'existe presque pas tant que l'homme ne sait que parler " [Lacombes] ) .

Dans une deuxième partie, nous passerons en revue commentée toute l'histoire du Livre, du Journal, des Lettres, liée aux grandes inventions techniques . Nous présenterons les rôles essentiels et les causes originelles que ces progressions ont apportées aux sociétés européennes et même mondiales .

Cordialement, bien à vous, Gerboise .

lundi 22 juin 2009

Vous est-il déjà arrivé de vous poser cette question, parfois obsédante* : Qu'est-ce que comprendre**, saisir le sens d'une réalité,d'une évidence ?

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* qui obsède : qui préoccupe de manière incessante, qui s'impose sans répit à la conscience . [ Première partie ] .

** comprendre : il s'agit de l'entendement, cette capacité de concevoir [ faire naître dans son esprit quelque chose qui est nouveau ; marque une action plus réfléchie, plus lente, plus concentrée, qui crée une idée, l'organise et la précise dans tous ses détails ] , juger [ suppose une interprétation d'un ensemble de faits] , raisonner [ employer des arguments pour convaincre, prouver ou réfuter ] .


Raisonner, ce n'est à proprement parler ni induire, ni déduire .

- Induire : tirer de certaines données [faits,affirmations ] les conséquences qui s'y trouvent impliquées ou qu'elles suggèrent ; de faits particuliers tirer une loi générale .

" Induire c'est, partant de certains faits observés, par exemple le passage de rayons lumineux dans un milieu réfringent (qui produit la réfraction : déviation de la lumière qui franchit la surface de séparation de deux milieux où la vitesse de propagation est différente) , ou bien l'ébullition d'un liquide - trouver une loi, autrement dit une relation constante, d'où ces faits puissent se déduire " Jean Laporte .

- Déduire c'est , tirer de certaines données [ faits, affirmations ] la ou les conséquences qui en découlent rigoureusement . Cette rigueur manque lorsque l'on parle d'induire .

" La déduction est le mouvement de l'esprit qui va d'intuition en intuition de façon à unir par un lien évident et nécessaire les deux termes d'une analyse " Ch. Serrus, Méthode de Descartes .

" La déduction fournit l'intelligibilité, non la certitude ; l'induction, méthodiquement conduite, la certitude, non l'intelligibilité . La vraie science résulte de leur collaboration " G. Heymans .

" La déduction est le raisonnement qui fait apercevoir la nécessité d'une relation . L'induction montre seulement qu'une relation est constante " E. Goblot .

L'induction n'est pas un processus intellectuel mais plutôt une sorte de tendance universalisante propre à l'esprit humain dont il faut essayer de montrer le bien fondé ;

La déduction, elle, n'est qu'une mise en forme [ en vue de l'exposition ] d'une découverte, d'une connaissance ignorée de ceux à qui l'on s'adresse : enchaînement de nature syllogistique ( qui procède par syllogisme : par raisonnement déductif rigoureux qui, ne supposant aucune proposition étrangère sous-entendue, lie des prémisses , affirmation dont on tire la conclusion ) , elle n'a aucune vertu novatrice puisque reposant, comme le syllogisme lui-même, sur le principe l'identité [ ou l'un ou l'autre de ses corollaires - par exemple Ce qui est vrai du tout l'est de la partie ... ] .

Le véritable processus créateur, le raisonnement, c'est cette activité relationnelle par laquelle l'esprit échappe sans cesse aux concepts statiques [ condensés de son acquit du moment, par lesquels il fixe et fortifie son savoir progressif ] ouvre ses concepts y fait apparaître des rapports fonctionnels qui permettent de les rattacher les uns aux autres en un réseau aux mailles toujours plus fines et plus complexes .

Nous voyons qu'à certains égards l'activité raisonnante a deux aspects : elle " ouvre " et décompose, elle relie et recompose ; deux " opérations " que la logique traditionnelle étudie à part l'une et l'autre sous les noms d'analyse et de synthèse .

Nous verrons dans un prochain billet, que faut- il penser de cette dualité .

Cordialement, bien à vous, Gerboise .

jeudi 18 juin 2009

Un habitat artificiel s'est peu à peu substitué à un écosystème naturel.Le zoologue Desmond Morris dans le ZOO HUMAIN nous fait saisir cette situation

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IL EST NÉCESSAIRE D'AVOIR CONSCIENCE DE CE QUE NOUS SOMMES RÉELLEMENT, NOUS AUTRES, LES ÊTRES HUMAINS, POUR POUVOIR RESTER EN ÉTAT D'ÊTRE RÉALISTE ET CONSCIENT DE NOTRE VÉRITABLE PERSONNALITÉ .


L'auteur du SINGE NU (voir notre billet du 7 Novembre 2008) nous fait découvrir dans ce merveilleux petit livre publié par les Éditions Bernard Grasset, en collection du Livre de Poche [** n° 3148] les vicissitudes de l'Homme et de ses animaux familiers captifs, tous les deux prisonniers de la nouvelle Société dans laquelle ils se trouvent plongés .

C'est un ouvrage que tous les lecteurs de notre blog " Savoirs et Réflexions " doivent absolument lire .

Dans un prologue, l'éditeur nous présente l'auteur et nous situe le contexte de ce remarquable et étonnant discours sur l' Homme et les animaux confinés dans ces centres de détention à liberté limitée que sont devenus les nouveaux territoires habités par ces êtres vivants !



Voici :

" Desmond Morris est né en Angleterre en 1928 . Diplômé de zoologie, il travaille de 1951 à 1956 à Oxford avec le groupe de Niko Tibergen . De 1956 à 1959, il dirige le service des émissions de télévision rattaché au Zoo de Londres . Nommé en 1959 directeur du département des mammifères de ce Zoo, il y poursuit actuellement [1969] ses recherches . Depuis 1967, il dirige également l'Institut des Arts contemporains . Après le Singe nu ... Desmond Morris a rédigé dans la même veine d'humour scientifique le Zoo Humain. A ce spécialiste de zoologie, on doit aussi une Biologie de l'art ."

" Dans l'étendue de sa domination sur la planète, l'homme perd souvent de vue qu'il se définit essentiellement comme un animal doué de raison classé parmi les mammifères de l'ordre des primates à côté des lémuriens et des singes . Diffère-t-il d'ailleurs tellement de ces derniers ? Dans le Singe nu, le zoologiste Desmond Morris a très brillamment démontré que non . Singes nus nous sommes, frères bavards du babouin . L'étude de notre comportement en tant qu'individus a entraîné Desmond Morris à examiner notre vie sociale selon la même méthode critique de naturaliste observant une espèce animale quelconque dans son milieu naturel . A ceci près que la prolifération humaine et la multiplication des villes ont pratiquement supprimé la nature pour ne laisser que des conditions artificielles comparables à celles d'un zoo .

Le paradoxe du monde moderne est, en effet, de contraindre à vivre dans un cadre ultra-perfectionné des " animaux " qui restent soumis aux impératifs biologiques des temps primitifs . L'homme captif de sa technique saura-t-il supporter cette distorsion ( déformation, déséquilibre, absence d'harmonie dans une évolution ;
effet qui prive un résultat statistique de son caractère représentatif en le faussant systématiquement )
, pourra-t-il rendre vivable le zoo humain ?

Il a su déjà merveilleusement s'adapter . Desmond Morris l'expose avec une ironie ( manière de se moquer [de quelqu'un ou de quelque chose] en disant le contraire de ce qu'on veut exprimer ; disposition moqueuse ; façon de le faire en s'ingéniant à rendre sensible à un esprit fin la fausseté ou l'invraisemblance de ce qu'on énonce ) et une maestria ( maîtrise, facilité et perfection dans l'exécution d'une œuvre d'art, d'une action, d'une narration : d'un exposé écrit ou oral,détaillé ,d'une suite de faits) scientifique qui rendent son livre aussi divertissant qu'instructif .


Introduction de l'ouvrage :

" Les pressions de la vie moderne deviennent (le livre a été écrit en 1970) accablantes (pénibles) , le citadin harassé qualifie souvent le monde grouillant où il vit de jungle de béton . Expression pittoresque qui veut décrire le mode de vie dans un centre urbain à forte densité de population, mais ce n'en est pas moins une description grossièrement inexacte, comme pourrait le confirmer quiconque a étudié une vraie jungle .

Dans les conditions normales dans leur habitat naturel, les animaux sauvages ne se mutilent pas, ne se masturbent pas, n'attaquent pas leur progéniture, n'ont pas d'ulcère à l'estomac, ne deviennent pas fétichistes, ne souffrent pas d'obésité, ne forment pas de couples homosexuels et ne commettent pas de meurtres .

Chez les humains citadins, inutile de dire que tout cela se produit .

Cela trahit-il alors une différence fondamentale entre l'espèce humaine et les animaux ?

Au premier abord, il le semblerait . Mais c'est là une illusion trompeuse . D'autres animaux ont en effet ce comportement dans certaines circonstances, et plus précisément lorsqu'ils sont victimes des conditions anormales qu'impose la captivité . L'animal de zoo en cage présente toutes ces anomalies que nous connaissons si bien pour les avoir observées sur nos congénères humains . Il est dès lors évident que la ville n'est pas une jungle de béton, mais un zoo humain .

Il ne faut pas comparer le citadin et l'animal sauvage, mais le citadin et l'animal captif . Le moderne animal humain ne vit plus dans des conditions naturelles pour son espèce .

Pris au piège, non pas par un chasseur travaillant pour un zoo, mais par sa propre et brillante intelligence, il s'est installé dans une immense ménagerie où, incapable de trouver le repos, il court constamment le danger de craquer sous cette tension impitoyable .

Toutefois, malgré les pressions, les avantages sont substantiels . Le monde du zoo, comme un parent gigantesque, protège ses pensionnaires : on leur assure nourriture, boisson, abri, hygiène et soins médicaux ; les problèmes fondamentaux de la survie se trouvent réduits au minimum . Les pensionnaires ont donc du temps de libre . La façon d'utiliser ce temps dans un zoo non humain varie, bien sûr, d'une espèce à l'autre . Certains animaux se détendent tranquillement et sommeillent au soleil ; d'autres trouvent l'inactivité prolongée de plus en plus difficile à supporter . Si vous êtes pensionnaire d'un zoo humain, vous appartenez inévitablement à cette seconde catégorie . Doté d'un cerveau inventif et qui a le goût profond de l'exploration, vous ne parviendrez pas à vous détendre très longtemps . Vous serez poussé inlassablement vers des activités de plus en plus élaborées . Vous chercherez, vous organiserez, vous créerez et, au bout du compte, vous vous serez plongé plus profondément encore dans une captivité plus étroite . Avec chaque raffinement nouveau, vous vous trouverez un peu éloigné de votre état naturel tribal, cet état dans lequel vos ancêtres ont vécu pendant un million d'années .

L'histoire de l'homme est l'histoire de sa lutte pour s'accommoder des conséquences de cette difficile progression .

C'est une situation confuse et qui prête à confusion, en partie à cause de sa complexité même et en partie parce que nous jouons là un double rôle puisque nous sommes tout à la fois spectateur et participant . Peut-être cette situation deviendra-t-elle plus claire si nous l'envisageons du point de vue du zoologue, et c'est ce que je vais tenter de faire dans les pages qui suivent . Dans la plupart des cas j'ai délibérément choisi des exemples qui seront familiers aux lecteurs occidentaux . Cela ne veut toutefois pas dire que pour moi mes conclusions ne valent que pour les cultures occidentales . Bien au contraire, tout donne à penser que les principes de base s'appliquent uniformément aux citadins du monde entier.

Si j'ai l'air de dire " faites machine arrière, vous courez à la catastrophe " , laissez-moi vous assurer qu'il n'en sera rien ? Au cours de l'infatigable évolution de notre société, nous avons triomphalement lâché la bride à nos puissants instincts d'invention et d'exploration : ils sont partie intégrante de notre héritage biologique . Ils n'ont rien d'artificiel ni d'antinaturel . Ils sont à l'origine de notre grande force tout autant que de notre grande faiblesse . Ce que j'essaie de montrer, c'est le prix de plus en plus lourd qu'il nous faut payer pour satisfaire ces instincts et quelle ingéniosité nous déployons pour régler cette facture, si exorbitante qu'elle soit . Les mises sont chaque jour plus élevées, le jeu plus risqué, les pertes plus stupéfiantes, le rythme de la partie plus endiablé . Mais malgré les dangers qu'ils présentent, c'est le jeu le plus passionnant que le monde ait jamais vu . Il serait stupide de suggérer qu'on devrait donner un coup de sifflet pour tenter de l'interrompre . Néanmoins, il y a différentes façons d'y jouer, et en comprenant mieux la vraie nature des participants il devrait être possible de rendre le jeu encore plus profitable, sans qu'il devienne pour autant plus dangereux ni même, en fin de compte, désastreux pour l'espèce tout entière .

L'aventure de l' Humanité : ce fut un très long parcours harassant , au début progressif permettant aux êtres humains de s'adapter aux différents contextes ; plein d'embûches, oui ! , mais également fécond en aventures formatrices, efficientes, qui va vers la fin , ces derniers siècles, avec l'avènement de l'organisation moderne,aller en s' accélérant, laissant " l'homme " démuni , privé des possibilités d'adaptations psychiques et morales aux nouveaux contextes : "

C'est ce que va nous faire percevoir Desmond Morris ...
poursuivons un peu notre citation en vue de vous faire saisir l'intérêt de prendre possession du contenu de ce livre ... de ne pas seulement le lire, mais de réfléchir profondément à toutes les conséquences de son contenu sur nous-mêmes, sur notre propre évolution personnelle !

" Imaginez un territoire de30 kilomètres de long sur 30 kilomètres de large . Supposez -le sauvage, peuplé d'animaux petits et grands . Représentez-vous maintenant un groupe compact de soixante êtres humains campant au milieu de cette région .
Essayez de vous voir assis là, en tant que membre de cette tribu miniature, avec le paysage, votre paysage, s'étendant autour de vous à perte de vue .
Nul sauf ceux de votre tribu n'utilise ce vaste espace . C'est votre domaine exclusif, le terrain de chasse de votre tribu . De temps en temps les hommes de votre groupe partent à la poursuite d'une proie . Les femmes cueillent des fruits et des baies . Les enfants jouent bruyamment dans les parages du camp, imitant les techniques de chasse de leurs pères . Si la tribu s'implante bien et se développe, un petit groupe s'en séparera pour coloniser un nouveau territoire . Peu à peu l'espèce va se répandre .


" Imaginez un territoire de 30 kilomètres de long sur 3à de large . Supposez-le civilisé, peuplé de machines et de constructions . Représentez-vous maintenant un groupe compact de six millions d'êtres humains campant au milieu de cette région . Essayez de vous voir assis là, avec tout le paysage complexe de la grande ville s'étendant tout autour de vous, à perte de vue .

Comparez maintenant ces deux paysages . Dans le second il y a cent mille individus pour chacun de ceux qui se trouvent dans le premier . L'espace est demeuré le même . En termes d'évolution, ce changement dramatique a été presque instantané : Il n'a fallu que quelques milliers d'années pour transformer le décors un en décors deux .
L'animal humain semble s'être brillamment adapté aux nouvelles et extraordinaires conditions qui lui sont imposées, mais il n'a pas eu le temps de changer sur le plan biologique, d'évoluer pour devenir une nouvelle espèce génétiquement civilisée .

Ce processus civilisateur s'est fait entièrement par l'apprentissage et le conditionnement .

Biologiquement parlant, il est toujours le simple animal tribal décrit dans la première scène . Il a vécu ainsi, non pas pendant quelques siècles, mais pendant un bon million d'années . Au cours de cette période, il a certes subi des changements d'ordre biologique . Il a évolué de façon spectaculaire . Les pressions dont il a dû triompher pour survivre étaient fortes et elles l'ont modelé .

Il s'est passé tant de choses durant les derniers millénaires, les années citadines, les années chargées de l'homme civilisé, qu'il nous est difficile de nous faire à l' idée que cela ne représente qu'une partie infime de l'histoire humaine . Elle nous est si familière que nous nous imaginons vaguement être parvenus à ce stade par un développement progressif et que, par conséquent,

nous sommes parfaitement équipés sur le plan biologique pour affronter tous les nouveaux risques que présente la société .

Si nous nous obligeons à réfléchir là-dessus avec une froide objectivité, force nous est de reconnaître qu'il n'en est rien .

C'est seulement notre incroyable souplesse, notre ingéniosité et notre faculté d'adaptation qui nous donnent ce sentiment .

Le simple chasseur de la tribu fait de son mieux pour arborer ses nouveaux atours le cœur léger et l'âme fière ; mais ce sont des habits compliqués, encombrants, et il ne cesse de trébucher dedans . Toutefois, avant d'examiner la façon dont il trébuche et perd si fréquemment l'équilibre, il nous faut voir d'abord comment il a réussi à coudre le fabuleux manteau de civilisation dans lequel il s'enveloppe .

Il nous faut commencer par abaisser la température jusqu'à revenir au coeur de la dernière période glaciaire, disons il y a vingt mille ans .

Nos ancêtres chasseurs avaient déjà réussi à se répandre à travers la plus grande partie du Vieux Monde, et n'allaient pas tarder à passer de l'extrémité orientale de l'Asie jusque dans le Nouveau Monde . Avoir atteint une expansion aussi fracassante signifiait sans doute que leur simple mode de vie de chasseurs était déjà suffisant pour faire pièce ( s'opposer, contrecarrer) à leurs rivaux carnivores . Mais cela n'a rien de si surprenant quand on songe que les cerveaux de nos ancêtres de la période glaciaire étaient déjà aussi grands et aussi hautement développés que les nôtres aujourd'hui . En ce qui concerne le squelette, la différence n'est pas grande entre nous . Physiquement parlant, l'homme moderne était déjà entré en scène .

A dire vrai, s'il était possible, à l'aide d'une machine à voyager à travers le temps, d'amener chez vous l'enfant nouveau-né d'un chasseur de la période glaciaire et de l'élever comme votre propre enfant, personne sans doute ne s'en apercevrait .


En Europe le climat était hostile, mais nos ancêtres le combattaient vaillamment . En utilisant les techniques les plus simples, ils parvenaient à abattre du très gros gibier . Par bonheur ils nous ont laissé un témoignage de leurs talents de chasseur, non seulement sous la forme des reliefs de repas que l'on peut de temps en temps déterrer du sol de leurs cavernes, mais aussi grâce aux extraordinaires fresques peintes sur les parois de celles-ci . Les mammouths velus, les rhinocéros à épaisse toison, les bisons et les rennes dont nous avons retrouvé les portraits ne laissent aucun doute quant à la nature du climat .
Lorsque aujourd'hui on émerge des ténèbres d'une caverne pour sortir dans la campagne inondée de soleil, il est difficile d'imaginer celle-ci peuplée de ces créatures enveloppées d'épaisses fourrures . Le contraste entre la température alors et maintenant frappe l'esprit .
A mesure que la dernière période de glaciation touchait à sa fin, la glace commençait à se retirer vers le nord au rythme de 50 mètres par an et les animaux de pays froids se déplaçaient vers le nord . D'épaisses forêts prenaient la place des paysages glacés de la toundra . La grande période glaciaire s'est terminée il y a environ dix mille ans, annonçant une nouvelle époque dans le développement de l'homme .

La percée devrait se faire à l'endroit où l'Afrique, l'Asie et l'Europe se rejoignent . Là, à l'extrémité orientale de la Méditerranée, s'opéra un léger changement dans les habitudes alimentaires de l'espèce humaine, qui allait modifier tout le cours du progrès humain . C'était en soi un changement assez trivial ( banal, commun) et assez simple, mais son impact devait être considérable . Cela nous paraît aujourd'hui tout naturel :

Nous appelons cela l' AGRICULTURE .

Jusqu'alors toutes les tribus humaines avaient deux façons de se nourrir : les hommes chassaient les animaux comestibles et les femmes cueillaient les végétaux comestibles . On équilibrait le régime en partageant . Pratiquement tous les membres adultes actifs de la tribu étaient des pourvoyeurs de nourriture . On stockait relativement peu de réserves alimentaires . On se contentait d'aller chercher ce qu'on voulait quand on en avait besoin . C'était moins hasardeux qu'il n'y paraît car évidemment la totalité de la population humaine était alors infime comparée aux chiffres énormes qu'elle atteint aujourd'hui . Toutefois, même si ces premiers chasseurs-cueilleurs avaient connu une réussite appréciable et s' étaient répandus au point de couvrir une grande partie du globe, leurs unités tribales demeuraient petites et simples .

Durant les centaines de millénaires au long desquels s'était poursuivie l'évolution humaines, les hommes s'étaient peu à peu adaptés, aussi bien physiquement que mentalement, sur le plan des structures comme sur celui du comportement, à ce mode de vie de chasseurs .

Le pas suivant, celui qui les mena à l'agriculture et à la production d'aliments, leur fit franchir un seuil auquel ils ne s'attendaient pas et

les précipita si vite dans une forme d'existence sociale inconnue qu'ils n'eurent pas le temps d'acquérir de nouvelles qualités soumises au contrôle génétique pour s'y habituer .

Désormais leur faculté d'adaptation et leur souplesse de comportement, leur capacité d'apprendre et de s'accommoder de modes de vie nouveaux et plus complexes allaient être mises à rude épreuve .

L'urbanisation et les détails compliqués de la vie citadine n'étaient plus qu'à un pas de là .

Par bonheur, le long apprentissage de la chasse avait développé l'ingéniosité et un système d'aide mutuelle .

Les chasseurs humains, certes, gardaient encore un sens inné de l'autorité et de la rivalité, comme leurs ancêtres singe [issus d'une branche évolutive parallèle] , mais leur sens de la rivalité s'était trouvé grandement atténué par un besoin de plus en plus pressant de coopérer . C 'avait été leur seul espoir de triompher dans la concurrence qui les opposait aux tueurs professionnels du monde carnivore établis depuis longtemps avec leurs griffes acérées, comme les grands félins .

Les chasseurs humains avaient développé leurs esprit de coopération en même temps que leur intelligence et que leur goût de l'exploration, et la combinaison des deux s'était révélée d'une redoutable efficacité .

Ils apprenaient vite, ils se souvenaient bien et étaient capables de rapprocher les éléments séparés de ce qu'ils avaient appris autrefois pour résoudre des problèmes nouveaux . ..

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... La plus ancienne ville connue s'élevait à Jéricho il y a plus de huit mille ans, mais la première civilisation totalement urbaine s'est développée bien plus à l'est par-delà le désert de Syrie, à Sumer ( en Mésopotamie) . C'est là, il y a cinq à six mille ans, que naquit le premier empire et qu'on supprima le " pré " du mot préhistoire

grâce à l'invention de l'ECRITURE . ..

... Ce fut ce changement, ce passage de la société personnelle à la société impersonnelle qui allait causer à l'animal humain ses plus grandes angoisses dans les millénaires à venir ...

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...Même si les techniques et communications de masse font dans les années à venir des progrès d'une surprenante nouveauté et auxquels on ne pense même pas aujourd'hui (1970) , elles continueront d'être handicapées par les limites biosociales de notre espèce .

Nous ne sommes pas équipés comme les termites, pour devenir les membres consentants d'une vaste communauté . Nous sommes et nous serons probablement toujours au fond, de simples animaux tribaux ...

...Maintenant que nous avons esquissé le cours des événements qui nous a amenés jusqu'à notre situation sociale actuelle, nous pouvons commencer d'examiner plus en détails les diverses formes grâce auxquelles nos modes de comportement ont réussi à s'adapter à la vie dans le zoo humain ou, dans certains cas, comment cette tentative s'est soldée par un échec désastreux ... "

Gerboise vous laisse maintenant la possibilité de continuer de découvrir la suite de cette épopée fantastique narrée par ce zoologue, si vous le désirez bien sûr . Cette lecture enrichira votre esprit et attisera votre Réflexion .

Bonne lecture de ce petit ouvrage pas onéreux publié en livre de poche par les éditions Bernard Grassé .

Bien à vous, cordialement, Gerboise .

mardi 16 juin 2009

Se représenter les choses, les phénomènes, les êtres : nous ne sommes pas tous, nous, les êtres humains, identiques, égaux, devant cette spécifité .

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Les images engendrées dans notre esprit et la structure de notre pensée : un équilibre des diverses espèces de représentations ou la prédominance de l'une d'entre elles, est la cause de la diversité des esprits .D'où l'existence de multiples variantes d'individus, de plusieurs modèles sensoriels tels que - visuels, auditifs, tactiles, moteurs ...

Il s'agit de la variété des imaginations ou des mémoires . Il est question de l'aptitude de chacun à percevoir plus spécialement un ordre de sensations .

Il n'est assurément personne qui n'ait remarqué la façon multiple dont se comporte la mémoire chez une personne et surtout l' enfant : alors que celui-ci retient surtout les faits ou les lieux, celui-là les chiffres ou les dates, l'un se rappellera plutôt les mots ou les idées, l'autre ,les couleurs, les sons ou les mouvements .

Témoignages, où sont vos réalités, " votre authenticité " , vos vraisemblances ? ... selon qui nous sommes !

Cette variété dans la conservation des souvenirs n'est au fond qu'un cas particulier de l 'inégalité des genres d'images, et celle-ci provient elle-même de l'aptitude de chacun à percevoir plus particulièrement un ordre de sensations [ nous devons tenir compte aussi de l'influence de l'attention sur la conservation de ces images]

En sorte que :

Celui qui est bien doué pour la perception des qualités sensibles, qui a le sens des couleurs, des sons, des saveurs, garde le souvenir de ces qualités .

Celui qui conçoit nettement les notions scientifiques [conception des idées abstraites] qui représentent la nature au moyen d'abstractions et de symboles, conserve mieux qu'un autre le souvenir des notions de ce genre et les a, au besoin, à sa disposition .

- Il est rare que le même esprit soit à la fois bien doué pour la perception et la mémoire des qualités sensibles, et pour la perception et la mémoire des notions abstraites et scientifiques .
- Il est même rare qu'on soit également bien doué pour les perceptions des divers sens . Que de musiciens n'entendent rien à la peinture, et réciproquement ! La spécialisation va plus loin encore . On a rarement au même degré le sens des formes et le sens des couleurs . Dans la perception visuelle des objets, les uns sont plus frappés par le contour, les autres par la couleur .
Les premiers voient les objets comme des dessins, les autres comme des taches ; ceux-là font les peintres dessinateurs, ceux-ci les peintres coloristes .

- Ajoutons que la concentration de l'esprit sur un objet est aussi une condition essentielle de la mémoire, que rien n'est plus propre à produire cette concentration que le sentiment, le goût pour certains objets, le plaisir qu'on y trouve, et que ce goût et ce plaisir dépendent eux-mêmes en grande partie de l'aptitude de l'esprit ou des sens à percevoir ces objets avec facilité et netteté [ la créativité, l'esprit d'invention, sa propre capacité de se représenter, de concevoir, de se projeter dans l'inconnu , de se mettre dans la tête du nouveau original et inédit] , varient d'après l'acuité et la finesse des sens .

Les personnes qui ont la vue très fine, très délicate, se représentent plutôt les aspects visibles des choses . Ceux qui ont l'ouïe plus développée se représentent plutôt les images sonores, de même pour les autres sens, l'olfaction pour un chimiste, la gustation pour un cuisinier, le tact pour un horloger, etc. Ces diversités naturelles dans les imaginations sont de très grandes importances pour la connaissance du caractère et des aptitudes de cette personne [ Au passage il ne faut pas omettre de dire que la langue maternelle de cette personne joue un rôle fondamental dans la manière de se représenter les concepts : les mots sont des " poteaux indicateurs " indispensables] .

Or, une telle diversité d'aptitudes dans la perception a sa cause dans le développement inégal des connections [synapses] entre les neurones dans les régions du cerveau, affectées à la réception des différentes catégories d'impressions sensorielles .

Cette aptitude à percevoir plus spécialement un ordre de sensations et par suite à en garder le souvenir crée la variété des esprits .

La nature donne à chacun de nous des sens et une intelligence ouverts et perméables à certaines impressions, fermés à certaines autres .

On sait que les objets " frappés " (éclairés) par la lumière " retiennent " et " absorbent " certaines longueurs d'ondes lumineuses et " renvoient " (réfléchissent) les autres ; d'où résulte la différence de coloration des objets .

De même nos sens et notre intelligence " absorbent " et " s'assimilent " une partie des "rayons ! " que le monde nous envoie et sont réfractaires à tout le reste : d'où résulte le caractère particulier de chacun de nous .

Les images sensibles en effet se mêlent à toutes nos pensées, ou plus exactement, comme le remarquait Aristote, nous ne pensons pas sans image .

L'idée la plus abstraite même et la plus immatérielle s'incarne dans le mot qui est déjà une forme sensible .

Quand nous pensons à un objet particulier, un paysage de montagne par exemple, il y a en nous quelque image de la sensation visuelle que nous aurions en sa présence . Quand nous pensons à un objet général, l'arbre ou l'animal de ce paysage, il y a en nous quelque " débris " plus ou moins vague d'une image analogue, et en tout cas l'image de son nom, c'est-à-dire des sensations visuelles, auditives, musculaires , que ce nom exciterait en nous, si nous le lisions, si nous le prononcions, ou si nous l'entendions .

Ainsi, dans toutes les opérations supérieures que nous faisons au moyen de noms abstraits, jugements, raisonnements, abstractions, généralisations, combinaisons d'idées, il y a des images plus ou moins effacées ou plus ou moins nettes .

De là suit une conséquence importante : l'équilibre des divers genres d'images ou bien la prédominance très accentuée de l'un d'entre eux, mettant à notre disposition pour imaginer, juger et raisonner tout ensemble ou, au contraire, une catégorie presque exclusive des souvenirs, il en résulte que chez une personne plus particulièrement douée par exemple pour les sensations optiques et peu sensible en même temps à toutes les autres impressions, ce ne sera pas la mémoire seule qui sera visuelle, mais encore l'imagination active, le jugement, le raisonnement et le langage intérieur .

Par conséquent, il est possible de distinguer, d'après l'importance et le rôle des diverses sortes d'images dans les habitudes de l'esprit, des variétés d'individus .
En ce qui concerne les visuels, toute idée se traduit en une image figurée ; les auditifs ont dans l'oreille le son des mots correspondant à toute pensée qu'ils forment ; les moteurs, inconsciemment, miment ou prononcent tout ce qu'ils pensent .

Tout ceci a une importance considérable, parce que cela touche de près à la formation et à l'expression de nos idées .

Nous reviendrons sur les différents types de sensations qui caractérisent les personnes et les conséquences pour leurs relations avec l'ensemble du monde extérieur, matériel et humain .

Cordialement votre, bien à vous, Gerboise .

vendredi 12 juin 2009

Moi et l'Autre, l'Autre et Moi .


En général notre habitude de tout rapporter à nous-même nous empêche de reconnaître et de comprendre les différences, la plupart du temps seulement supposées, superficielles .


" Je n'ay (n'ai, je ne fais pas, je n'ai pas en moi, dans mon esprit ) point cette erreur commune de juger d'un autre selon que je suis . J'en croy (j'en crois, j'accepte) aysement (aisément, facilement) des choses diverses à moy (moi) . Pour me sentir engagé à une forme (à une idée, à une interprétation) , je n'y oblige pas le monde, comme chascun (chacun) fait ; et croy, et conçois mille contraires façons de vie ; et, au rebours (contrairement, à l'inverse) du commun, reçoy (reçois) plus facilement la différence que la ressemblance en nous . Je descharge ( décharge, libère d'une obligation, dispense) tant qu'on veut un autre estre (être) de mes conditions et principes, et le considère en luy-mesme ( lui-même) , sans relation, l'estoffant ( l'étoffant, l'enrichissant, lui donnant de la consistance) sur son propre modelle (modèle, ses propres convictions) ...

Et si, les ayme (aime) et les honore d'autant plus qu'ils sont autres (différant) que moy ."

Michel de Montaigne I, XXXVII, Du jeune Caton .

Si nous refusons d'ordinaire de voir ces différences, c'est pour deux raisons :

-D'une part nous ne voyons point les hommes tels qu'ils sont, mais tels qu'ils se présentent à nous ; nous estimons chacun " tout enveloppé et empaqueté ".

Si nous comparions vraiment un homme à l'âme riche, plein de courage et de jugement, à la " tourbe de nos hommes, servile, basse, instable et continuellement flottante en l'orage des passions diverses " , nous reconnaîtrions qu'entre ceux-ci et ceux-là, il y a plus de distance qu'entre la terre et le ciel . Mais nous sommes incapables de voir l'homme " sans ces eschaces " ( sans ces ~ caractéristiques ~, particularités internes) , nous ne voyons que les aspects extérieurs . Et dès lors, nous oublions les différences essentielles pour les apparentes, " il se présente soudain à nos yeux une extrême disparité qui ne sont différents par manière de dire qu'en leurs chausses " : nous ne voyons pas la vraie disparité (différence) qui est ailleurs mais seulement ce que plus tard la psychologie sociale nommera des stéréotypes (conventions) sociaux .

-D'autre part notre habitude de tout rapporter à nous-même nous empêche de reconnaître et de comprendre les différences .

Il ne s'agit plus tant cette fois d'une distinction comme verticale, d'une hiérarchie, que d'une distinction horizontale . C'est l'esprit de tolérance, délibré des excès de l'égocentrisme, qui ménerait seul à une juste considération des divers styles de vie : " Je n'ay point cette erreur commune ...[voir en tête l'ensemble de la strophe (ensemble cohérent) citée ] ... qu'ils sont autres que moy " .

Sans doute Montaigne parle-t-il ici plutôt de divers styles de vie que de divers naturels ; mais nous savons que derrière ces styles de vie différents, il y a des " formes " naturelles différentes, car les différences entre les hommes intéressent tout leur être .

Nous argumenterons, raisonnerons sur un sujet passionnant : De quelle nature sont donc ces différences entre les hommes, d'après Michel de Montaigne ? Ceci, lors d'un prochain billet .

Cordialement , bien à vous, Gerboise .

mercredi 10 juin 2009

Apparence*, vraisemblance**, probabilité***, plausibilité****

.

* L'apparence indique ce qui porte à croire, mais de la manière la plus faible . Ce qu'on voit d'une chose, l'effet que la vue d'une chose produit sur nous, ainsi que l'écoute, les senteurs, les saveurs et la perception tactile de la matière . Aspect qui nous apparaît de quelque chose, ce qu'on voit d'une personne ou d'une chose, la manière dont elle se présente à nos yeux et à nos autres sens, à l'ensemble de nos sensations . L'aspect trompeur des choses: se défier des apparences, en ce sens se distingue de phénomène ; sauver, garder les apparences (les apparences sont sauves) .


** La vraisemblance [sembler] : caractère vraisemblable, qui peut être considéré comme vrai ; qui semble vrai, sans doute ; qui a l'apparence de vérité conforme à la marche ordinaire des choses ; de réalité. Ce qui est vraisemblable est ce qui a l'apparence de la vérité ; mais il n'a que cette apparence et il aurait besoin d'un examen plus attentif .


*** La probabilité : C'est une apparence de vérité qui approche de la certitude . Ce qui est probable est ce qu'il est raisonnable de supposer parce que fondé sur des raisons de quelque importance, raisons qui font pencher vers la croyance à la réalité . Ce qui permet de conjecturer ( imaginer, présumer, supposer) raisonnablement si un événement se produira ou non . La notion de Probabilité est également un terme savant, une grandeur numérique, qui suppose un calcul, une mesure fondée sur le rapport des cas favorables et des cas possibles . Elle peut être forte, non négligeable, significative, infime, nulle ...


**** La plausibilité : ce qui peut être [ semble] admissible[ c'est une explication très plausible, recevable, concevable], qui semble devoir être approuvé et admis, mais qui nécessite toutefois un examen ultérieur pour le déclarer absolument juste .

Ce qui est apparent a une certaine apparence en sa faveur .Ce qui est vraisemblable est conforme au train ordinaire des choses ; il n'y a ni contradiction, ni impossibilité .

Ce qui est probable a en sa faveur un commencement de preuve positive . Nous constatons que ces trois expressions désignent trois degrés croissants de crédibilité .

Plausible signifie "digne d'être applaudi " , digne d'assentiment . Une opinion plausible, une excuse plausible, c'est une opinion, une excuse à laquelle nous devons ou pouvons acquiescer .

On voit que dans plausible nous considérons moins l'apparence, la vraisemblance ou la probabilité que l'effet que la chose envisagée produit sur nous .

A l'évidence, plausible a totalement perdu sa référence aux applaudissements . Nous ne saurions plus y voir qu'une sorte de doublet de probable . Plausible qualifie ce qu'on s'apprête à croire : le crédible .

Cette suite montre bien à quel point la vérité se fait incertaine : nous avons besoin de mots variés pour indiquer la relation mal assurée que nous entretenons avec le réel , à tout ce qui nous arrive, par le sens ou par les faits .

Situation d'autant plus aggravée que la réalité a désormais, de manière massive, l'image insignifiante qu'en produisent les médias télévisuels . Nous sommes par ce biais, cet éclairage, sans cesse enclins, disposés à tenir pour effectif, concret, véritable, réel, ce qui n'est qu'apparent, vrai ce qui n'est que vraisemblable, certain ce qui n'est que probable - et inversement à fabuler ( exagérer) sur l'indubitable ( l'incontestable ) , à faire une chimère ( une illusion, un fantasme) de la réalité ...

Notons que la langue française offre bien d'autres moyens d'exprimer cela . En particulier avec " sans doute " , locution dont le sens flotte curieusement au grès des emplois .
" Sans doute, on trouvera que ... " exprime une assurance polie ou rhétorique (avec style creux pour plaire) ; mais dans " C'est sans doute un technicien qui viendra réaliser la maintenance ce soir ", l'expression ne signifie que probablement, c'est-à-dire à peine plus que peut-être .

Tout ajout, en fait, diminue ici la force de l'assertion . Comme dans le langage de l'amour, où le fameux " Je t'aime un peu, beaucoup, passionnément, à la folie " dira toujours moins qu'un simple " Je t'aime " .

Pensez que : " Le vrai peut quelquefois n'être pas vraisemblable " , comme l'affirmait Boileau .

Réfléchissez à cette affirmation de Descartes : " Considérant combien il peut y avoir de diverses opinions touchant une même matière, qui soient soutenues par des gens doctes ( savants) , sans qu'il y en puisse avoir jamais plus d'une seule qui soit vraie, je réputais ( j'estimais, ,je présumais, je tenais pour ) presque pour faux tout ce qui n'était que vraisemblable " .

" Puisque la fonction du vraisemblable dans la tragédie est d'empêcher l'esprit de s'apercevoir de la feinte (de la ruse) , le vraisemblable qui le trompe le mieux est le plus parfait, et c'est celui qui devient nécessaire " [ Fontenelle, Réflexions poétiques ] .

.

lundi 8 juin 2009

Propos d'Alain ( Emile Chartier, 1868-1951) , Esquisses de l'Homme*, Technique et Science .

* ) Publié chez Gallimard en 1938 , XLV, P. 136 , 1938 .

Dans cet ouvrage d'Alain, nous retrouverons cette grande richesse de savoirs et de réflexions présente dans l'ensemble de ses Propos . C'est pourquoi nous vous proposons ,ici encore, de vous "plonger " dans un de ses textes admirables concernant l'homme et toute l'humanité .



TECHNIQUE et SCIENCE

Il n'y a point de technique s'il n'y a outil, instrument ou machine ; mais ces objets, fabriqués de façon à régler l'action, et qui sont comme des méthodes solidifiées ( figées, qui résistent aux évolutions momentanées, qui sont à la fois effectives et durables) , ne font pas eux-mêmes la technique, qui est un genre de pensée (d'instrument immatériel pour agir) .

Un ouvrier qui se laisse conduire par la chose (l'acte) , la coutume et l'outil, n'est pas encore un technicien .


Un technicien exerce la plus haute pensée, et la mieux ordonnée ; un technicien découvre, réfléchit, invente ; seulement sa pensée n'a d'autre objet que l'action même . Il ne cesse de l'essayer . Toutes ses idées sont des idées d'actions .

On se plaît à dire que l'expérience décide de tout ; et c'est vrai ; mais c'est vrai de trop loin pour qu'on détermine par là les différences dans cette foule des hommes qui inventent .

L'ouvrier adhère à l'expérience ; il ne perd jamais le contact ; mais le théoricien aussi à sa manière ; et le technicien se trouve placé entre ces deux extrêmes .

Palissy, autant qu'on sait, était un ouvrier d'émaux ; mais non pas un pur ouvrier, car il cherchait .


Le propre de l'ouvrier c'est qu'il invente sans chercher, et peut-être en refusant de chercher . Guidé par la chose, par l'invariable outil, par la tradition, il ne se fie (fier : faire confiance) jamais à ce qui est nouveau ; il invente par des changements imperceptibles (insensibles) à lui-même .

La pirogue, la voile, l'arc, le moulin à vent, l'agriculture, la cuisine, l'art de dresser et d'élever les animaux, sont dus à cette pratique serrée et prudente, pendant une immense durée, de maître en apprenti, et, plus anciennement, de père en fils .

L'art du luthier est un de ceux où l'on peut admirer un lent progrès par pure imitation . La technique s'y met présentement, et l'on tente de produire des sons de violoncelle sans violoncelle .
A l'autre extrême, un Helmholtz (physicien et physiologiste allemand, 1821-1894, qui en acoustique interpréta les sonorités par l'existence d'un son musical simple) analyse les timbres, et nous apprend de quels sons harmoniques se composent les voyelles . Tous suivent l'expérience et interrogent la chose .

Le premier suit les procédés connus ; le second invente des procédés ; le troisième cherche à comprendre, c'est-à-dire à débrouiller ses propres idées .

Que gagne-t-on à comprendre ? Peut-être simplement ne pas craindre .

Lucrèce (poète latin, ~ -98-~-55) après Epicure (philosophe grec, ~ -341- ~-270) , disait qu'il se souciait peu de choisir entre telle ou telle conception de l'éclipse, pourvu qu'on n'y mît pas les dieux . Je me borne à rappeler ici l'immense idée de Comte ( Auguste, philosophe français, 1798-1857) , d'après laquelle la science est née de théologie nettoyée, et non de technique .


Cette idée est livrée aux discussions ; mais, de toute façon, elle éclaire le sujet .
Dans les choses de l'âme, comme passions, sentiments, aptitudes, caractères, vertus, vices, il se trouve aussi des ouvriers, des techniciens, des savants . M. de Saci (Le Maître de Saci, prêtre français,1613-1684) , le fameux directeur (de conscience) , était une sorte d'ouvrier ; l'inspecteur de la Sûreté en est un autre . Saint-Cyran ( théologien français, 1581-1643) et Sherlock Holmes ( personnage créé par Conan Doyle) sont plutôt des techniciens . Descartes est un savant dans les passions .

L'ouvrier manie l'homme selon sa tradition, et devient habile sans le vouloir .
Le technicien ose d'avantage, et secoue l'homme, si je puis dire, de diverses manières .
Le savant cherche seulement
à se représenter ses propres passions comme des mouvements non absurdes ; et c'est ainsi que Descartes comprend que l'amour est bon pour la santé, et la haine, au contraire, très mauvaise .

Cette troisième route n'est pas assez suivie . On ne gagne pas beaucoup à agir sur les passions comme on ferait une soudure, ou comme on manie le condensateur dans une téléphonie sans fil . Au lieu que Spinoza a marqué le point idéal en disant :

" Une passion cesse d'être une passion dès que nous en formons une idée claire et distincte . "


Ainsi, de même qu'il y a des ouvriers d'astronomie, comme les Égyptiens qui arrivaient à prédire les éclipses par longues archives, et des savants d'astronomie, qui se font autant qu'ils peuvent des idées explicatives des apparences célestes , je dirais de même qu'il y a des ouvriers de la psychologie, des techniciens de psychologie, et de rares savants, plus précieux et plus secourables en cette difficile manière qu'en aucune autre .

Qu'est-ce que c'est que le savant de psychologie ?


C'est Descartes qui en donne le mieux l'idée . Il joint la contemplation avec l'adhésion la plus stricte à la nature . En toute science, il y a étude continuelle de l'expérience ; il est bon de voir comment se définissent les différences, comment la recherche s'oriente, et comment il se fait que l'orgueilleuse technique n'ait pas tout dominé . C'est que les formes géométriques et mécaniques sont bien plus légères que les outils . Ce sont des ombres qui limitent l'expérience ; on les voit à peine ; on les change d'après l'événement sans que la rigueur géométrique cède jamais .

L'arpentage n'est pas moins rigoureux en marécage ."

20 Août 1930

Cordialement , bien à vous, Gerboise .








samedi 6 juin 2009

C'est la fête des mamans .

Le baiser, Poème de Mme de Pressensé .

1 - Ninette en promenade

Ninette a mis fine chaussure,
Robe blanche avec ruban bleu,
Un large noeud à sa ceinture ;
La joie éclate dans ses yeux .

2 - Elle rencontre une petite fille malheureuse et veut la consoler

Elle rencontre une fillette,
Pâle et maigre sous ses haillons,
Qui reste immobile et muette,
La suivant de ses yeux profonds*.

" Oh ! maman, la pauvre petite ! ...
Permets-moi de la consoler ? ... "
Et Ninette s'en va bien vite
Sécher les pleurs qui vont couler .

Mais l'enfant détourne la tête,
Repousse sa main et se tait .
Ninette, surprise, inquiète,
Lui dit : " Mais que t'ai-je donc fait ? ...

3 - Elle offre de lui donner ce qu'elle possède

" Je te donnerai ma ceinture,
Mon beau ruban, si tu le veux ".
Hélas ! la pauvrette murmure :
" Pourquoi faire ? " et baisse les yeux .

- " Veux-tu mon mouchoir de batiste ** ?
Veux-tu des gâteaux ou du pain ?
Oh ! seulement ne sois plus triste ... "
L'enfant répond : " Je n'ai pas faim ... "

Elle tient dans sa main fermée
Une croûte de vieux pain bis*** ;
Elle n'est donc pas affamée ...
Ninette a l'air triste et surpris **** .

4 - Finalement elle la console, en lui donnant un baiser

" Je vois que rien ne peut te plaire
Et je ne veux pas te forcer ;
Mais tu voudras bien, je l'espère,
Au moins me laisser t'embrasser " .

Le regard de l'enfant s'éclaire .
Quelle joie un mot peut causer !
" Ah ! depuis la mort de ma mère
Je n'ai pas reçu de baiser ! "

Madame de Pressensé

1 - Ses yeux profonds : ses yeux à l'expression desquels on comprend que la petite fille a beaucoup de pensées qu'elle n'exprime pas .
2 -
Mouchoir de batiste : mouchoir fait avec de la toile de lin très fine .
3 -
Pain bis : le pain bis est un pain de qualité inférieure et de couleur brun et grisâtre .
4 -
A l'air triste et surpris : on peut dire indifféremment a l'air surpris ou a l'air surprise, en faisant accorder le participe avec le complément air ou avec le sujet Ninette .

Cordialement, et bonnes fêtes des Mères, Gerboise .

jeudi 4 juin 2009

Gerboise va être " comme une âme en peine " ! : une grisaille, une désolation, un grand vide va survenir dans le monde de la culture et des livres . *

Regardons vers l'avenir !
Nous pensons à vous deux .
Courage ! devant l'adversité !

Regardez, admirez ce Suricate qui affronte, tient tête à ce cobra, " il a su rester ferme dans l'adversité " ! Belle leçon de courage qui force l'admiration .

Ne plus " avoir sous la main " l'œuvre de nos amis, nous demandera, nous réclamera , à nous aussi un certain courage [ bien entendu d'une autre nature] .

Nous leur souhaitons de tout cœur, prospérité dans leurs nouvelles occupations, hobby et une parfaite santé physique et morale pour y parvenir . Surtout que votre tristesse de nous quitter [nous en sommes certains] ne soit que passagère !

* La liste de diffusion biblio-fr qui regroupait le monde des bibliothécaires et documentalistes francophones et toutes les personnes passionnées de culture ( voir sur le net le site Biblio-fr) .

Nous allons devoir affronter cette situation avec réalisme comme les Suricates, les Meerkats du désert du Kalahari [ Afrique Australe] , le feraient dans toutes les circonstances scabreuses .

Oui ! Gerboise est triste . Une communauté du Livre va s'annihiler ( se réduire à rien) , disparaître : ainsi en ont décidés ses fondateurs .

Il va falloir accepter cette réalité : le site Biblio-fr@cru.fr, va cesser de nous apporter des informations cruciales, uniques sur la " Toile " .

Comme les Suricates dans " ce nouveau désert " nous devrons nous adapter et envisager d'autres paysages, d'autres perspectives qui nous en sommes certains , nous ferons progresser !

Il nous reste la chose la plus importante à réaliser :

Féliciter et remercier Hervé Le Crosnier et Sara Aubry , créateurs et modérateurs du site pour leur compétence, leur dévouement, leur constance et leur efficacité durant cette quinzaine d'années . En particulier d'avoir fait connaître notre blog à tous les membres de la Liste de Biblio-fr .

Gratitude et reconnaissance, Gerboise .

mercredi 3 juin 2009

Variation*, changement**, mutation***, modification****, alternance***** ...

* Une variation : - passage d'un état à l'autre graduellement ; différence entre deux états successifs .
** Le changement : - état de ce qui évolue, se modifie d'une façon irréversible ou non [ choses, circonstances, états psychologiques] .
*** Une mutation : - évolution brutale des objets, des us et coutumes, des êtres, de la matière vivante [la mutation du monde agricole] .
**** La modification : - changement qui n'affecte pas l'essence, la nature, de ce qui fluctue.
***** L' alternance : - succession répétée, dans l'espace ou dans le temps, qui fait réapparaître tour à tour, dans un ordre régulier, les éléments d'une série .

Façon, manière, attitude : d'apparaître, de varier, de changer,de se transformer, de muter, de se modifier, d'alterner, de se succéder, de se remplacer, de disparaître ... !


La variation consiste à être tantôt d'une façon, manière, attitude, tantôt d'une autre .
Le changement se résume seulement à cesser d'être le même .
Le changement peut-être du tout au tout, intégral ; mais également tout à coup, soudain ; tout à fait, complet, absolu ; tout de suite, immédiat, sur-le-champ ; tout de même, malgré tout .
Les vicissitudes laissent subsister beaucoup de semblable .

L'ensemble de ces termes s'appliquent à tout ce qui altère, transforme,corrige,déforme et modifie .

Changement et mutation marquent le passage d'un état à un autre, et il ne faut qu'un de ces passages pour avoir changé ; variation marque le passage rapide par plusieurs états, et c'est cette succession d'états différents qui fait la variation .
Pour ce qui est de changement et mutation, ils ne se différencient, ils ne se distinguent, ils divergent, que parce qu'ils ne sont pas du même style ; changement est du langage général ; mutation est d'un langage plus didactique .

Les faits historiques nous révèlent, nous font assister aux changements des états, des royaumes, des empires ; ils nous enseignent les lois des mutations que subissent, supportent progressivement les sociétés, les collectivités .

Enfin la variation musicale représente une bonne image de ce terme, et nous fait sentir sa dimension créative . L'écrivain, le musicien, le peintre, le sculpteur ne créent pas à partir de rien . Toute œuvre nouvelle n'est qu'une modification d'un texte déjà existant .

mardi 2 juin 2009

Un gamin de Paris : un gavroche spirituel et moqueur, un titi parisien, gamin déluré et malicieux .




Un gamin d' Paris
C'est tout un poème
Dans aucun pays
Il n'y a le même
Car c' est un titi
Petit gars dégourdi
Que l'on aime .
Un gamin d' Paris
C'est un doux mélange
D'un ciel affranchi
Du diable et d'un ange
Et son œil hardi
S'attendrit devant une orange
Pas plus haut que trois pommes
Il lance un défi
A l'aimable bonhomme
Qui l'appelait
Mon petit .
Un gamin d' Paris
C'est une cocarde
Bouton qui fleurit
Dans un pot d' moutarde
Il est tout l'esprit
L'esprit de Paris
Qui musarde .

Pantalon trop court pour lui
Toujours les mains dans les poches
On le voit qui déguerpit
Aussitôt qu'il voit un képi .

Un gamin d' Paris
C'est tout un poème
Dans aucun pays
Il n'y a le même
Car c'est un titi
Petit gars dégourdi
Que l'on aime
Il est héritier
Lors de sa naissance
De tout un passé
Lourd de conséquences
Et ça il le sait
Bien qu'il ignore l'histoir' de France
Sachant que sur les places
Pour un idéal
Des p'tits gars pleins d'audace
A leur façon fir'nt un bal
Un gamin d' Paris
Rempli d'insouciance
Gouailleur et ravi
De la vie qui danse
S'il faut, peut aussi
Comm' Gavroch' entrer dans la danse.
Un gamin d' Paris
m'a dit à l'oreille
Si je pars d'ici
Sachez que la veille
J'aurai réussi
A mettre Paris en bouteille .

M . Michel, A . Marès

lundi 1 juin 2009

Ce que Bernard Palissy avait observé avec toute son acuité visuelle et intellectuelle.Cette plante grimpante, l'igname, permet de l'observer soi-même


En agrandissant, vous pourrez observer l'enroulement en vrille, en tresses de plusieurs rameaux . L'un d'entre-eux, ici, est entrain de s'enrouler autour d'une autre .

Vous pouvez agrandir chaque image de cet ensemble de photographies [réalisées par Gerboise, à l'aide d'un appareil photographique CANON EOS 30 D équipé d'un objectif macro EFS 17-85 mm] par un clic gauche et ensuite reculer d'une page pour revenir au cadre initial .


A la conquête de l'espace ! et contre la pesanteur qui règne en maître !
Voici l'ensemble de la plante, émergeant de la tubercule , maintenant en partie enfouie dans le terreau . Vous pouvez observer la partie haute de cette tubercule et les billes d'argile expansée recouvrant ce terreau en surface .
Vue de l'ensemble de la partie supérieure de la plante .

Enroulements et ainsi, appropriation, colonisation de l'espace, à l'aventure ... ! N'est-ce pas fabuleux ?

Igname : nom vulgaire de la dioscorée cultivée et de la dioscorée ailée qui, originaire de l'Afrique, a été transportée aux Antilles , appelée patate douce . Ses racines fibreuses donnent des tubercules ovoïdes, qui pèsent quelquefois jusqu'à trente livres, qui sont farineuse et alimentaire et donc un excellent aliment . La tige de l'igname est grimpante, herbacée, garnie de feuilles opposées ou alternes, taillées en cœur, qui laissent échapper de leur aisselle des épis de fleurs, mâles sur un pied, femelles sur un autre .

C'est cette tubercule, [dont on immerge la partie inférieure dans l'eau, soutenue par 3 petites tiges en bois enfoncées perpendiculairement à sa surface qui vont servir de points d'appuis sur les bords du pot : récipient contenant le liquide] qui va donner des radicelles, puis après quelques semaines ses premières tiges et feuilles, donc une nouvelle plante que vous pouvez voir sur les photographies ci-dessus .

Le 4 Mai 2009, dans notre blog, nous avions présenté Bernard Palissy, ce précurseur ... avions -nous dit, ce grand physiologiste souvent en contemplation devant les phénomènes de la vie végétale , qui disait :

" M'allant promener, j'allais considérant les merveilleuses actions que le souverain a commandé de faire à la nature, et entre autres les rameaux de vignes, des pois
( également les ignames, dites patates douces aux Antilles, tubercules originaires d'Afrique) , lesquelles semblaient qu'ils eussent quelque sentiments et connaissances de leur débile nature .
Je voyais un nombre de petits rameaux qui n'avaient rien à quoi s'appuyer et jetaient en l'air leurs petits bras, pensant empoigner quelque chose pour soutenir la partie de leurs dits corps ; alors je venais présenter certaines branches et rameaux ; et, ayant fait cela le matin, je trouvai au soir que les plantes susdites avaient jeté et entortillé plusieurs de leurs bras à l'entour des petits rameaux " .

Les petits rameaux dont parle Bernard Palissy, ces vrilles, terme de botanique, sont des productions filamenteuses en forme de tirebouchon lorsqu'elles s'enroulent à plusieurs, au moyen duquel les plantes grimpantes et sarmenteuses s'attachent entre- elles et aux corps qui les environnent .

Ces phénomènes de croissance d'une plante à partir d'une tubercule, puis ce mode de développement et de conquête de l'espace environnant grâce à ces " rameaux explorateurs " conquérants , peuvent faire l'objet d'expériences d'observation suivies de description des événements successifs pour apprendre aux enfants " à faire se développer un être vivant " , puis à l'examiner, constater les différentes étapes de l'épanouissement d'une telle plante potagère très utile pour l'alimentation des êtres humains dans le tiers monde et enfin se soumettre aux règles , aux prémices ( un avant- goût) d'un début de recherche scientifique .

Également le plaisir de voir se développer une plante chaque jour, la conduire à évoluer dans une direction et dans la manière que l'on a décidé !
N'est-ce pas merveilleux ?

De plus agir,créer, et ainsi se retrouver dans " les traces " de ce grand savant que fut Bernard Palissy , n'est-ce pas sublime, extraordinaire ?

Bien à vous, amicalement, Gerboise .