mercredi 14 janvier 2009
Réflexions à propos de l'estimation de la " valeur " d'un être humain,scientifique ou autre,qui cherche à comprendre partiellement notre univers (*)
(*) et qui , en imaginant , en concevant, en inventant donc [créant, forgeant, innovant] un nouvel " outil " ( un instrument technique ou/ et intellectuel), découvre, discerne et donc dévoile ainsi un nouvel aspect de notre monde !
Il s'agit, tout bien considéré, de l'acte de la Société (d'une certaine communauté humaine) qui estime la nécessité d'une appréciation, d'une évaluation, d'une expertise, de ceux qui s'adonnent (embrassent volontairement une activité) au métier de chercheur, et de tout être qui se consacre, se livre à des activités intellectuelles . Cette communauté humaine qui estime devoir juger de leur vivant ceux qui doivent " rendre des comptes ! ? ", est composée uniquement " d'hyper-spécialistes ! "
Essayer de réaliser cette forme de recherche " ouverte " sur le monde est une gageure,(un défi) non parce que ce type d'activité est particulièrement difficile, voire impossible, mais parce que les résultats vont déstabiliser l'ensemble des examinateurs, submergés par des contextes en dehors de leur champ de recherche ... Ils seraient obligés d'envisager une remise en question de leurs idées immuables qu'ils considèrent, au moins jusqu'à la fin de leur " carrière officielle " , même de la fin de leurs jours (ne doit-on pas, parfois dans certaines circonstances, attendre la disparition, le repos éternel, de ce type d'arbitre !) , comme définitives .
Et cela est un crime impardonnable .
Méditent-ils suffisamment sur ce qui peut définir la valeur d'un chercheur, d'un être humain ? On peut en douter, dans la plupart des cas - surtout si ces philosophies du monde ne correspondent pas à la leur .
Sous le " talent " de n'importe quel personnage, d'un vrai chercheur, d'un inventeur , de celui qui crée, qui trouve une idée, un fait , un phénomène, on découvre des caractéristiques élémentaires, des qualités inhérentes dont aucune ne lui est spécifique mais qui, " ensembles " , le cernent tout de même mieux .
L'évaluation de la valeur des chercheurs, de tout être humain qu'est-ce donc ?
Voici le moment de faire appel, pour jauger de ces comportements, au réalisme de l'auteur de cette comédie : Caron de Beaumarchais, qui démontre l'hypocrisie de la société dans cette pièce, le Mariage de Figaro, où il peint un insolent valet, Figaro, s'adressant à son maître, le comte Almaviva .
" Figaro - " Feindre d'ignorer ce qu'on sait, de savoir tout ce qu'on ignore ; d'entendre ce qu'on ne comprend pas, de ne point ouïr ce qu'on entend ; surtout de pouvoir au-delà de ses forces ; avoir souvent pour grand secret de cacher qu'il n'y en a point ; s'enfermer pour tailler des plumes, et paraître profond, quand on n'est, comme on dit, que vide et creux ; jouer bien ou mal un personnage ; répandre des espions et pensionner des traîtres ; amollir des cachets ; intercepter des lettres et tâcher d'ennoblir la pauvreté des moyens(la fin justifie les moyens, la raison d'Etat justifie tout !) par l'importance des objets, voilà toute la politique ou je meure ! (au subjonctif : que je meure, si j'ai menti) .
Le comte Almaviva - Eh ! c'est l'intrigue que tu définis !
Figaro - La politique, l'intrigue, volontiers ; mais, comme je les crois un peu germaines (de même aloi) en fasse qui voudra ... "
Oui, des " examinateurs ! " réputés intègre, incorruptibles, vertueux, se plièrent, se plie toujours sans broncher à ces techniques ...
Après ces quelques considérations affligeantes, sévères, nous pouvons continuer à mettre en valeur les qualités de ceux qui peuvent faire l'objet de ces vicissitudes (!) inadmissibles mais cependant réelles :
Continuité (constance) , ténacité (persévérance) , acuité de l'observation (perspicacité dans les constatations, les commentaires) , habileté expérimentale (savoir- faire, subtilité) , don des comparaisons entrecroisées (des facteurs présents et agissants deux à deux, trois à trois ... ) , sens critique et art de trouver la faille (la lacune, être capable de détecter l'anormalité, ce qui n'est pas cohérent, ce qui " jure " , ce qui détone, ce qui est comme " un cheveu dans la soupe " ) dans un système, enfin et surtout : aptitude à poser les bonnes questions, " à poser les problèmes " , c'est à dire à saisir les réalités des choses, puis à concevoir un protocole d'observations, d'expériences, en imposant ensuite avec exigence des " contre-épreuves " , enfin à rebâtir quand il le faut une autre hypothèse de travail et à recommencer ...
Et, dans cette démarche complexe, où l'imagination et l'impatience sont sans cesse ramenées entre des berges, ne pas tomber dans des pièges tentants : la fascination par le concept et le mot, ou par l'outil .
Ce genre de fascination (attrait, attirance), qui peut tourner à la perversion, tend à devenir plus fréquent à mesure que les techniques deviennent de plus en plus nombreuses et complexes . Elle est évidemment associée à l'hyper-spécialisation . Or toutes ces propriétés paraissent si banales, car vécues ou observées, qu'elles ne sont plus scrutées avec assez d'attention par beaucoup d'examinateurs des comités . Ces derniers, blasés ou las, ces membres devant apprécier un membre de la communauté, substituent à cette analyse rigoureuse, influencés par des groupes de pressions, un vague " profil " esquissés sur les " on-dits "(bruits qui courent, rumeurs) .
A ce relâchement, on ne peut trouver qu'une source intellectuelle, qui corrompt l'éthique : la faiblesse toujours plus sensible du niveau ou du souci épistémologique chez un nombre croissant de gens de sciences et de techniques .
Nous pouvons énoncer les opinions de divers hommes de science sur leurs propres fonctionnements intellectuels, qui ne doivent pas toujours être prises à la lettre .
Exprimées dans le langage de tous les jours elles n'en révèlent pas toute la richesse et la complexité . Charles Darwin, à propos de l'évolution des Espèces, a comparé la découverte, non pas à un échec et mat, mais au déplacement de la pièce sur une case située en dehors de l'échiquier . Le biologiste Claude Bernard semble nous livrer une clef : " Il faut avoir une idée préconçue quand on fait des expériences . Sans cela, on marche à tâtons . Mais il faut la vérifier, non la prouver . Ce grand physiologiste ne nous explique pas où, chez lui et chez d'autres, siège ce " don " de formuler de multiples hypothèses (un don, mais aussi une discipline, une règle de conduite ; on peut y être entraîné, exercé par de bons maîtres et s'y exercer soi-même . Après tout, un bon policier ou un bon magistrat instructeur s'y entraînent et s'y améliorent aussi avec l'expérience ) . Le grand mathématicien, Henri Poincaré disait qu'il avait trouvé la solution à des problèmes pendant son sommeil car au matin survenait dans son esprit une clarté plus lumineuse . Albert Einstein, après avoir énoncé ses idées sur la Relativité, disait : " Il n'y a pas de voie logique qui conduise aux lois hautement universelles . On ne peut les atteindre que par une " intuition " (voir un de nos prochains billets) fondée sur une sorte d'amour intellectuel des objets d'expérience " .
L'homme de génie, c'est tantôt un personnage qui regarde ce que les autres ne voient pas [ les provocations !] , tantôt un homme dont le jeu (fonctionnement) cérébral est plus rapide, plus nuancé, plus riche sans doute à cause d'interférences vaso-motrices et hormonales plus actives, plus vivaces, simple hasard ou fortuite réalisation de ce qu'ont inconsciemment préparé les réflexes conditionnels des générations précédentes .
Une chose est certaine : " tous les grands découvreurs furent en fond continu, des chevaux de labour ", des acharnés et des hommes absurdes, poussant un système à l'absolu, et " l'absolu est l'idéal de la science " [ Claude Bernard] .
Bientôt , nous prendrons en considération dans notre site , l'influence de l'intuition dans les mécanismes de la réflexion .
En attendant, bien à vous, Gerboise .
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