Les idées exprimées avec réalisme, les réalités qui y sont exprimées avec force , seront-elles enfin , au commencement et au cours de cette nouvelle année , mises en application ? Seul le proche avenir nous le dira . Avec la foi et un peu de confiance , pouvons-nous l'espérer ?
Dans le cadre de l'analyse de livres pouvant vous apporter des réflexions et des informations très utiles , dans le cadre de notre blog Gerboise, nous vous proposons l'ouvrage de Francis Mer avec Sophie Coignard :
" VOUS, LES POLITIQUES" , édité aux Éditions Albin Michel en 2005 .
Francis Mer, ancien président du géant de l'acier Arcelor, a été Ministre des Finances de 2002 à 2004 .
" En 2002, lors d'une des premières réunions ministérielles dirigées par Jean-Pierre Raffarin à Matignon, le nouveau ministre de l' Économie, des Finances et de l' Industrie apostropha ses collègues d'un " Vous, les politiques ... " qui provoqua un certain émoi dans l'assistance. Le Premier ministre lui répliqua qu'il était maintenant l'un des leurs et qu'il devait donc dire " Nous, les politiques " . Mais Francis Mer ne s'est apparemment jamais tout à fait plié à cette recommandation . Ce grand patron a gardé son style un peu raide, direct et sans fioritures (sans détours, "sans tourner autour du pot", sans subtilités), face à tous ses interlocuteurs (...) "
C'est un livre très intéressant que nous vous conseillons de lire car il apporte un ensemble d'informations et de réflexions qui peuvent s'intégrer dans notre connaissance du monde qui nous entoure et nous permet de "cultiver" notre esprit critique .
Les mots, les phrases et les paragraphes surlignés en caractères gras par nous-mêmes, ont été considérés comme importants dans le cadre , bien sûr, de l'objet de notre blog, et en eux-mêmes, par ce qu'ils apportent de fondamental à notre connaissance .
( Les ajouts et les commentaires placés entre parenthèses , en mauve clair, correspondent à des explications ajoutées au texte de Francis Mer, car jugées utiles et nécessaires à la compréhension du texte présenté et placé dans le cadre de notre projet) .
Nous nous permettons, dans le but de vous inciter à prendre connaissance du livre, de citer, de reproduire ci-dessous la conclusion de l'auteur : la voici .
" Le monde change, la France doit changer, elle a les moyens de changer, en a-t-elle la volonté ? Tel pourrait être un résumé lapidaire (bref, concis, laconique, manière de parler par sentences) de mes interrogations !
La mutation (changement dans les moeurs, les croyances, les lois ...) dans laquelle est embarqué (entraîné) le monde depuis qu'il a réalisé son unité géographique, économique et presque politique est généralement sous-estimée .
Dans son ampleur, sa vitesse mais aussi son contenu . A travers les révolutions démographiques et technologiques en cours depuis une génération, l'activité humaine est en train de concourir à une maîtrise de son environnement naturel à laquelle nul n'aurait pu rêver il y a cinquante ans .
Cette maîtrise , c'est à l'homme et à sa capacité d'organiser sa vie collective qu'il reviendra de l'utiliser au mieux pour son bien ; même si les dérapages (dérives, laisser-aller, désinvoltures, relâchements) actuels peuvent nous inquiéter à bien des égards , la révolution de l'information devrait lui permettre de surmonter les risques inhérents à celle-ci au profit des immenses opportunités qu'elle lui ouvre .
Dans ce grand flux(mouvement) , notre pays s'interroge : où allons-nous, de quoi demain sera-t-il fait ? Quel avenir pour nos enfants ? Saurons-nous préserver ce qui fait notre identité, notre culture, ne risquons-nous pas d'être emportés par ce flot ?
Ces interrogations sont normales . La France a bâti son unité dans un cadre étatique qui laissait très peu de place à l'initiative individuelle et où la liberté de chacun s'accommodait des contraintes consenties pour que l'intérêt collectif soit pris en compte .
Face à ces interrogations, le repli est la première tentation . Mais il serait suicidaire, tant est fort le courant du changement . Il nous faut évoluer tout en restant fidèles à nous-mêmes, fidèles à la manière dont nous voulons continuer à vivre ensemble .Il nous faut apprendre à utiliser individuellement les nouveaux outils, les nouvelles capacités d'entreprendre qui sont à notre disposition , sans avoir peur, parce que nous aurons su entretenir la confiance en nous, clé du succès dans un monde où tout devient possible à coeur vaillant .
Mais il faut en même temps établir les nouvelles relations dans lesquelles nous voulons exercer les liens de fraternité spécifiques de notre communauté, et retrouver l'essence de l'égalité des chances qui constitue notre lien républicain . La difficulté est de ne pas transformer cette égalité en un égalitarisme (doctrine qui affirme l'égalité des droits entre les hommes sous les aspects civil, politique, économique et social) qui s'opposerait de façon stérile à la dynamisation des initiatives qui caractérise dorénavant un monde de plus en plus libre .
.
Pour réussir dans ce monde nouveau, une condition : notre pays doit capitaliser sur ses atouts et gérer de manière responsable les problèmes qui montent . Le tout en restant lucide, sans perdre son âme, ou, plus modestement, son esprit civique, c'est-à-dire en ayant un projet dont il est fier, auquel il croit et qui maintient donc sa cohésion . Vaste programme, peut-on penser ! Pas vraiment, à l'examen .
Nos atouts ? Quitte à en surprendre plus d'un, je n'hésite pas à dire que notre fonction publique en est un ! Elle est de qualité, elle est consciencieuse et fière de servir les Français . Elle n'attend qu'un peu d'attention, un peu de souffle pour repartir courageusement à l'assaut des problèmes qu'on lui désignera . Mais pour cela, elle doit être gérée, c'est-à-dire reconnue, animée, évaluée, formée comme doit l'être le personnel de toute entreprise dans le monde actuel .Faisons-le, donnons-nous les organisations adaptées, les statuts modernisés, les systèmes de rémunération incitatifs qui sont des recettes éprouvées pour remettre nos administrations en mouvement et en faire des atouts et non des handicaps qu'elles deviendraient sans ce nouveau souffle .
En quelques années, il y a eu des progrès qu'il serait absurde de nier : l'état d'esprit a changé, le vocabulaire s'est renouvelé, il n'est plus inconvenant de parler de productivité, de processus, de culture du résultat, de qualité, de gestion de la ressource des hommes ...
Cela montre à l'évidence que toute la fonction publique est prête à se mobiliser . En avant donc !
Un autre atout majeur, qui est largement sous-utilisé, est notre capacité à créer de la connaissance et, plus intéressant, à donner aux jeunes le plaisir de travailler ensemble pour qu'ils le gardent ensuite au cours de leur vie professionnelle . Cette manière de " grandir à l'école ", il nous faut la cultiver et la systématiser . Pour cela des moyens humains et matériels sont indispensables . Notre système d'éducation a d'énormes lacunes que nous connaissons et qu'il faut maintenant combler rapidement .Les enjeux dans un monde de la connaissance sont tels qu'il est inquiétant, voire honteux, pour ceux qui savent et qui sont aux manettes, de constater que les diagnostics se succèdent, toujours les mêmes, et que rien ne se passe ! Si la France doit avoir une seule priorité, c'est bien celle de l'éducation, de la maternelle à l'université .
Ce qui a fait notre force il y a plusieurs décennies est en train de devenir une faiblesse majeure et le fait de constater que nous sommes pas les seuls dans cette situation ne peut en rien constituer une excuse .
Notre système éducatif a besoin d'être repensé dans sa structure, ses programmes, son encadrement, y compris dans l'implication des parents et des entreprises qui en sont les "clients" . Il ne répond plus aux qualités et connaissances dont auront besoin les générations à venir . Il est donc de notre responsabilité collective de prendre les décisions adéquates, car le temps presse et ne se rattrape pas dans ce domaine . Mais il faut le faire en ayant confiance en notre corps enseignant, en s'appuyant sur lui, en lui redonnant la fierté, qu'il a eue mais qu'il a perdue, d'oeuvrer pour le bien-être des générations montantes . Après tout, quel autre métier peut offrir une telle satisfaction ?
Néanmoins, soyons clairs : ce n'est pas une question de moyens financiers mais de volonté politique et de capacité managériale . Gérer, au sens plein du terme, la plus grande " entreprise" française, le million de fonctionnaire de l'Education nationale, ne s'improvise pas . Adapter à cet immense système décentralisé les pratiques qui font leurs preuves dans le monde économique n'est ni facile ni rapide .
Raison de plus pour s'y atteler toutes affaires cessantes et y consacrer les meilleurs cerveaux, les meilleures compétences et, bien sûr, les moyens matériels requis, notamment dans l'enseignement supérieur où les conditions de l'efficacité sont simples et connues :un corps enseignant compétent et motivé par des conditions de travail, de carrière et de rémunération suffisamment attractives pour y attirer une proportion satisfaisante des meilleurs de chaque génération . Un taux d'encadrement des étudiants nettement plus élevé pour se rapprocher des écoles où il fait bon travailler . Et bien sûr des étudiants se retrouvant sur les campus non parce qu'ils y vont par hasard ou par méprise, mais parce qu'un système d'orientation professionnelle au collège-ou au lycée- et, osons le dire, un système sélectif à l'entrée de l'université auront canalisé vers des lieux d'excellence ceux dont les capacités les préparent le mieux à réussir dans des disciplines qui supposent effort, rigueur et ténacité . Mais cette orientation-sélection qu'une immense hypocrisie s'interdit aujourd'hui d'officialiser auprès des jeunes que l'on préfère voir perdre deux ou trois ans avant de se retrouver livrés à eux-mêmes dans un contexte d'échec qui ne peut que les marquer durablement, cette sélection doit bien sûr s'accompagner d'une revalorisation de toutes les autres filières professionnelles et d'une réorganisation de leur accès pour que les enfants et les parents en redécouvrent l'intérêt et l'attrait .
Il est consternant (déplorable, désolant, affligeant)qu'une grande majorité de parents souhaitent que leurs enfants deviennent fonctionnaires . Cela traduit pour beaucoup une peur de l'avenir, une recherche de la sécurité, un refus de la vie qu'il est urgent de combattre, au nom même de l'intérêt de ces générations qui doivent au contraire entrer dans leur âge adulte, les yeux grands ouverts, en ayant pleine confiance dans leur capacité de bâtir leur vie professionnelle et personnelle .
En étroite liaison avec la reconstruction de l'université où l'on enseigne mais où l'on cherche aussi, un autre atout français, celui de la recherche, a besoin d'être rapidement et résolument repensé dans son organisation et dans sa relation avec le secteur privé . Dans un monde caractérisé par la globalisation des activités et la libération des initiatives, il doit être clair pour tous les Français que l'évolution de notre pays n'est acceptable que vers le haut, grâce à une "matière grise " plus fournie et mieux utilisée pour générer les recherches et donc (statistiquement !) les découvertes scientifiques , technologiques, techniques qui permettront à la France de donner le meilleur d'elle-même .
Cela, ne veut bien sûr pas dire que l' Occident doit revendiquer le monopole de la pensée ! Mais cela traduit la manière constructive dont il doit alimenter la pompe du progrès mondial . L'indispensable renouvellement de l'offre et l'élargissement des connaissances créent la nécessité de repenser la manière dont l'université et les grands organismes de recherche sont organisés pour augmenter le rendement - je crois que c'est bien le mot juste même s'il choque encore certains - de cet effort collectif . Il faut aussi mieux le coupler avec celui des entreprises qui , en France, n'apportent pas une contribution comparable à ce qui se passe dans les autres pays . Là encore, le diagnostic n'est pas nouveau et les remèdes sont sur l'étagère !
Encore faut-il inscrire cette réforme urgente dans la perspective d'une société européenne à croissance démographique faible, où l'augmentation des revenus proviendra largement des investissements immatériels dans la recherche, l'innovation et la formation et où ces investissements permettront également de lutter contre les effets externes négatifs de la mondialisation .
Mais un pays de taille moyenne comme la France devra accepter la nécessité de choisir les domaines à privilégier et d'éviter tout saupoudrage sectoriel ou géographique . Il lui faut concentrer ses moyens en association étroite avec les entreprises, sur certains pôles d'excellence de niveau mondial et pour cela il est nécessaire de nouer des partenariats européens forts .
En recherche et innovation la qualité joue un rôle essentiel qui ne résulte pas automatiquement de l'accumulation de la quantité .
D'où la nécessité d'évaluer la pertinence et l'efficacité des dépenses publiques et de "redécouvrir" que 60% des chercheurs opèrent dans le secteur privé, que les treize premiers groupes français réalisent la moitié des dépenses des entreprises mais aussi que les entreprises indépendantes de taille moyenne emploient plus de chercheurs que les grands organismes publics de recherche !
A travers une nouvelle coopération public-privé, n'opposant plus recherches fondamentale et appliquée, nos entreprises doivent aussi comprendre l'opportunité qu'elles ont de contribuer à la construction " voulue " de leur espace français et européen par un renouvellement organisé de leur offre .
Cela n'est en rien incompatible avec la poursuite de leur développement international : il faut seulement veiller à ce que cela soit compatible avec le respect des règles mises en oeuvre par un marché financier sous la coupe duquel il serait inacceptable qu'elles tombent inconsciemment ou non .
Ce que font leurs collègues américaines ou japonaises qui sont fières d'opérer dans des pays qui ont une stratégie, il faut que nos entreprises apprennent à le vouloir et à le faire dans une France et une Europe qui savent où elles vont .
Comme la construction européenne en cours ne leur donne pas encore les mêmes opportunités - faute parfois d'incitations - , il revient aux responsables politiques de bâtir les dispositifs, contractuels et financiers, encourageant les entreprises françaises à participer à de grands projets européens qu'elles doivent contribuer à faire émerger .
Les défis que je décris, la France peut les relever . Je serais tenté de dire qu'elle le peut, parce qu'elle le doit ! Nous n'avons pas d'autre choix .
" Tu dois , donc tu peux . " Telle est, je l'ai toujours pensé, la formule du courage en politique . Invoquer la barrière de l'impossible, l'inertie des circonstances, le poids des habitudes ou des "droits acquis ", tout cela n'est qu'alibi du renoncement, paravent de l'inaction .
" Pas de si, pas de mais, il faut réussir ", disait Bonaparte . Allons-y . Reprenons confiance !
Mais pour être efficace et ne pas tourner aux rodomontades (vantardises, fanfaronnades) , le volontarisme doit assurément remplir quelques conditions .
D'abord, il faut dire aux Français les choses telles qu'elles sont . Il n'y a pas de sujets interdits, pas de vérités malséantes . Un pays où la vérité se réfugie dans les " samizdats " (mot emprunté au russe signifiant proprement "auto-édition" ; il désigne la diffusion clandestine des ouvrages interdits par la censure dans l'ex. U.R.S.S. et par métonymie, changement de nom, un ouvrage ainsi diffusé )qu'on se refile sous le manteau, sur les sites Internet et dans les arrières -cuisines, n'est pas une démocratie en bonne santé ! En un mot : nous devons partir de constats francs et sans restriction . Cela suppose une rupture ( avec le " politiquement correct " qui empoisonne le débat public .
Ensuite, une vision claire de la solution : en France, il faut le dire, ce n'est pas ce qui manque . Notre pays pèche moins par manque d'intelligence que par manque de volonté . Les rapports, qui disent essentiellement la même chose depuis trente ans, s'entassent dans les placards des " hauts comités " , " hauts conseils " et autres " comités d'experts " . Il faut maintenant arrêter de faire des rapports, il faut agir !
Ce qui manque le plus, c'est l' audace ( courage, hardiesse extrême : "ceux qui ont l'audace de tenter l'impossible", Roger Martin du Gard) , la force de percer la muraille du conformisme ambiant . Or, cette muraille est en papier . Les Français, sourdement, n'attendent qu'une chose : que les hommes politiques osent la franchir ...
Pourquoi n'osent-ils pas ? Eh bien, mon expérience m'a convaincu d'une chose : ceux que j'appelle " politiques " - on me l'a assez reproché ! - sont trop souvent obsédés par leur existence médiatique ; Or la meilleure manière d'avoir sa photo dans le journal tout en préservant sa cote de popularité, c'est une sorte d'activisme consensuel, qui évite soigneusement d'aborder les vrais problèmes . Mais ce faisant, ils évitent aussi la vraie gloire .
C'est pourtant le plus beau risque à courir . La vision claire des solutions doit donc être portée par une volonté farouche (acharnée, tenace) , par une conviction (certitude)puissante, enracinée, chevillée au corps, et qui voit plus loin que la prochaine échéance électorale ; Il nous faut des hommes et des femmes qui ne conçoivent pas le mandat politique comme un métier auquel on s'accroche coûte que coûte, mais comme une mission, limitée dans le temps, devant produire de réels changements . IL faut être suffisamment détaché du système pour affronter sans reculer les conséquences de toute action véritable, telles que les décrivait le général de Gaulle : " Des remous dans l'opinion et la difficulté dans le suffrage ." Le modèle (attitude exemplaire)de Cincinnatus, ce Romain qui après avoir sauvé la République s'en retournait à sa charrue, n'est pas si mauvais ...
Mais comme je ne crois guère à son retour, je proposerai autre chose à nos politiques : qu'ils considèrent que la meilleure manière de gagner une popularité durable, une popularité qui résiste au temps, c'est de braver le conformisme et d'oser de grandes choses pour notre pays . C'est aussi de cette façon qu'ils resteront dans l' Histoire . " Francis Mer
Oh ! oui , dans cette conclusion, sont présentées avec un réalisme redoutable, nombre de vérités ! J'ose espérer que, ce (les projets proches de ceux exprimés ici, dans cette conclusion de Francis Mer) que veut entreprendre notre nouveau Président de la République en ce début de l'année 2008, va réussir . Il doit réussir , c'est notre voeu le plus profond, pour l'avenir de notre douce France .
Au cours de prochains billets, Gerboise développera les conséquences de nombreux points de ce livre et de sa conclusion , dans les domaines des Savoirs et de la Réflexion sur les activités de la connaissance. Bien à vous .
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire