(1) voir la suite dans un prochain billet .
Sans les arrêts imposés par le code de la route , la circulation urbaine serait dangereuse , anarchique, impossible ! Dans nos phrases aussi , nous devons lutter contre les embarras de l'expression en introduisant de l'ordre, en morcelant les divers éléments , et par le choix de "voies de dégagement ". De cette surveillance dépend la clarté de nos paroles et de nos écrits.
Les relations des mots entre eux, des propositions (groupe de mots comprenant essentiellement un sujet, un verbe, un attribut ~ mot exprimant une qualité, une manière d'être attribuée à un nom par l'intermédiaire d'un verbe comme être, devenir, paraître, sembler, trouver, nommer, élire, proclamer, croire, faire, etc. ~ et parfois des compléments ) entre elles, des phrases entre elles, par suite, des idées ainsi exprimées sont marquées en français par la place de ces éléments et aussi, comme on vient de le voir, par certains termes dont l'unique raison d'être est de les unir, à savoir par les prépositions et les conjonctions . Mais ce n'est pas que cela .
Dans la forme orale, ces rapports sont sinon marqués, du moins soulignés par la lenteur, par la rapidité, par des pauses du débit, par la variété des inflexions de la voix .
Dans la forme écrite, ils sont soulignés aussi par des signes conventionnels, appelés signes de ponctuation.
Cette ponctuation , c'est donc l'Art de distinguer , par des signes conventionnels, en l'exprimant d'une autre manière , les phrases entre elles, les sens partiels qui constituent ces phrases, et les divers degrés de subordination qui conviennent à chacun de ces sens .
Mettre la ponctuation, manière de ponctuer .Une même phrase, ponctuée de diverses manières, peut avoir un sens tout à fait différend .
"Mettant dans sa lecture cette espèce de ponctuation délicate qui fait sentir les différents genres de mérite par des inflexions aussi fines que variées" (d'ALEMBERT, Éloges, Lamotte .)
Un texte mal ponctué est difficile, sinon impossible, à lire et même à comprendre, car il peut prêter à des erreurs d'interprétation
Cet ensemble de signes sert à marquer surtout les poses et les arrêts indispensables au lecteur . Elle correspond à des modulations (inflexion variée de la voix; se servir de sa voix, utiliser cet art de rythmer ses paroles avec habileté) , à des arrêts, à des suspensions de la voix, par suite aux différentes nuances de la pensée .
La ponctuation est comme la respiration de la phrase .C'est un élément de clarté . Elle y fait saisir l'ordre, la liaison, les rapports des idées .
Ces signes appartiennent à deux groupes :
-1- les uns ont une valeur de sentiment ;
-2- les autres sont des éléments de clarté .
Les signes de ponctuation qui marquent le sentiment .
--Un point d'interrogation indique que la phrase qu'il termine exprime un sentiment réel ou feint (verbe feindre, simuler, faire semblant) de doute, d'incertitude, d'incrédulité .
Quelle température fait-il ? Quelle heure est-il ? N'est-il pas regrettable de mentir ?
-- Un point d'exclamation avertit que la phrase est animée d'un sentiment d'étonnement, d'indignation .
Comme il a grossi ! Quoi, il a osé ! Comment ! il est parti !
Les signes de ponctuation qui servent à la clarté .
Les autres signes de ponctuation sont le point, les deux points, le point et virgule, la virgule .
--Le point marque la fin d'une phrase .
Il fait froid ce matin . La neige va tomber .
--On met deux points pour annoncer soit des paroles de quelqu'un, soit le développement, soit l'explication, la justification de ce qui précède . Dans le dernier cas, ce signe équivaut à car,
en effet .
La durée comprend trois divisions : le passé, le présent et le futur. Il l'a fait : c'était nécessaire.
La mort ne surprend point le sage :
[Car] Il est toujours prêt à partir . (La Fontaine)
-- Le point et virgule sépare soit des groupes de mots, soit des propositions, soit des groupes de propositions, lorsque chacune de ces propositions, chacun de ces groupes se compose d'éléments déjà séparés les uns des autres par des virgules .
L'un paraît agir par des réflexions profondes , et l'autre par de soudaines illuminations ; celui-ci par conséquent plus vif , mais sans que son feu eût rien de précipité ; celui-là d'un air froid , sans jamais rien de lent ... (Bossuet)
La virgule -1- sert à détacher les éléments de la proposition ou de la phrase qui ne sont unis par aucune conjonction .
Femme, moine, vieillard, tout était descendu . ( La Fontaine)
L'impertinent rebute, aigrit, irrite, offense . (La Bruyère)
Si la conjonction ( et, ou, ni) apparaît, la virgule devient inutile :
.
Ni l'or ni la grandeur ne nous rendent heureux . (La Fontaine)
Le contraire pourtant se produit : 1) Quand les termes coordonnés sont de dimensions assez étendues :
Ni les troubles, Zénobie, qui agitent votre empire, ni la guerre que vous soutenez virilement contre une nation puissante ..., ne diminuent rien de votre magnificence .(La Bruyère)
2) Quand plus de deux conjonctions de coordination sont accumulées :
Elle n'a ni parents, ni supports, ni richesse .(Molière)
3) Quand la virgule a pour objet d'indiquer que le terme coordonné n'est pas coordonné au terme qui précède immédiatement :
Ils(les sapins) montent par centaines jusqu'au dôme noircissant qui ferme le ciel, et leur raideur est héroïque .(Taine)
-- La virgule -2- sert à délimiter à leurs deux extrémités, comme le ferait une parenthèse, certains éléments de la proposition ou de la phrase qu'on pourrait isoler ou même détacher du reste .
Ces éléments sont : 1) un mot mis en apostrophe :
Donnez, riches, l'aumône est soeur de la prière .(Victor Hugo)
2) Un mot mis en apposition (emploi d'un nom, d'un adjectif, d'un participe placé auprès du nom ou du pronom dont il est séparé par une virgule, pour ajouter une qualification) .
Maître corbeau, sur un arbre perché,
Tenait en son bec un fromage .(La Fontaine) .
Les Gaulois, ces fiers guerriers .
L'homme, juste par nature, fut corrompu par le luxe .
Lié par ses serments, il ne pouvait rien faire .
Toutefois on ne sépare pas l'apposition dans des formules comme :
Capitaine renard allait de compagnie
Avec son ami bouc des plus haut encornés (La Fontaine)
3) Un sujet ou un complément redoublé :
Il est si beau, l'enfant, avec son doux sourire .(Victor Hugo)
Votre lettre, je l'ai reçue . je l'ai reçue, .
4) Certains compléments de circonstance :
J'aime le son du cor, le soir, au fond des bois ...,(Alfred de Vigny)
C'est le cas surtout lorsque ces compléments précèdent le verbe : ils sont ainsi plus indépendants de lui et prennent par suite plus de relief .
Au bout de quelques jours, le voyageur arrive
En certains cantons ... (La Fontaine)
Mais quand ils sont étroitement unis au terme qu'ils complètent et qu'ils sont indispensables au sens, ils s'écrivent sans ponctuation :
Ce livre coûte vingt euros . Il a dormi toute la nuit .
La soif les obligea de descendre en un puit . (La Fontaine)
Sous un sourcil épais il avait l'oeil caché .( La Fontaine)
5) Les propositions intercalées :
Enfant, lui dit le maître , je ne t'ai point entendu .
6) Les propositions à valeur d'adjectif qu'on pourrait retrancher sans rendre la phrase inintelligible :
Un cristal, qui n'était encore que germe, commença à se développer et à apparaître .
Le contraire arrive dans l'exemple suivant :
Nul animal n'avait affaire
Dans les lieux que l'ours habitait .(La Fontaine)
7) Certaines propositions circonstancielles, auxquelles on peut appliquer les mêmes remarques à peu près qu'aux compléments de circonstance cités plus haut . Quand la proposition circonstancielle précède la principale, elle est en général délimitée par deux virgules ou par une virgule et un autre signe de ponctuation :
Quand vous pourrez, ne manquez pas de vérifier .
Le contraire souvent se produit quand elle suit :
T'attendre aux yeux d'autrui quand tu dors, c'est erreur .(La Fontaine)
Et nous achèverons nos expériences quand nous le pourrons .
8) Le participe, qu'il constitue ou non une proposition indépendante, surtout quand il marque une circonstance, soit de temps , soit de cause .
Le technicien étant occupé, ce ne lui fut pas une chose facile .
Installés, les voilà commençant les expériences .
L'usage de la ponctuation n'obéit pas toujours à des règles fixes . Il a varié au cours des siècles, et il varie, à une époque donnée, d'un écrivain à l'autre .
(Voir la suite 1, dans un prochain billet) . Bien à vous, Gerboise .
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