vendredi 13 février 2009

Considérations sur la place relative des "degrés d'organisation" dans l'apparition,la création, la stabilité, l'évolution des choses de notre monde .



Ce monde dans lequel nous vivons nous présente des objets, des êtres, des phénomènes . Notre dessein, notre visée, notre ambition même, est d'attirer votre attention sur ce qui est essentiel pour vous faire comprendre l'importance d'un déchiffrement, d'une traduction en clair, qui vous permettra de justifier leur présence en un lieu et à un moment de leur existence et donc d'accéder aux " éléments " de leur genèse .


" Tous les esprits qui sont capables d'une telle synthèse ont le devoir impérieux (auquel on ne peut résister) de l'entreprendre . Autrement l'énorme foisonnement ( surabondance, prolifération) de nos connaissances risque de devenir un fatras (un amas ou un ensemble confus, hétéroclite, de choses sans valeur, sans intérêt) informe, écrasant l'humanité sous sa masse " [ Henri PRAT, 1960].

Le monde terrestre qui nous entoure, et dont nous faisons, en quelque sorte, parti (dont nous sommes, d'une certaine manière, issu ) , est constitué d'objets plus ou moins figés [fossilisés !] , plus ou moins en évolution, qui résultent souvent de l'aboutissement et de la coparticipation de phénomènes de nature très différente et parfois très éloignés dans le temps .

C'est la Géologie [qui va constituer le support de notre réflexion car elle est universelle] , cette science de la Terre, dont l'étude apprend à se familiariser avec les objets matériels, actuels et anciens, à toutes les échelles d'espace et de temps : massifs granitiques des vieux socles , bâtis continentaux (ensembles qui supportent les vieux socles d'âge précambrien ), ou intrusions plus récentes des chaînes hercyniennes ou alpines ; cristal de feldspath ; inclusions dans les cristaux, etc.

Chaque objet évoque tout d'abord l'idée de volume, c'est-à-dire d'espace à trois dimensions .

Comme l'avait énoncé Héraclite, philosophe grec de l'époque Ionienne, tout objet possède en outre une durée : Chaque massif de granite est né, a évolué, s'est transformé, a été atteint par l'érosion et puis a disparu .

Nous le verrons et nous vous le ferons comprendre et admettre dans l'ensemble de ce texte .

La Géologie n'a donc pas attendu la Physique pour atteindre, à sa manière, la notion d'espace-temps [4 dimensions] et elle se préoccupe depuis longtemps de reconstituer les " visages " successifs de parties plus ou moins étendues de la Terre : reconstitutions paléogéographiques (anciennes dispositions des géographies successives, chronologiques, dans le temps et dans l'espace) et de les enchaîner comme les images et séquences d'un film [histoire géologique] . Chaque " être géologique " possède également une masse et une composition chimique, c'est-à-dire une dimension matérielle . Il dégage de la chaleur ou en reçoit, émet des radiations variées, modifie localement le champ électrique ou/et magnétique, diffuse autour de lui des molécules solubles ou volatiles, etc. , ce qui constitue la dimension énergétique .

Chaque " être matériel " envisagé doit donc être considéré comme un système hyperspatial, c'est-à-dire comme un groupement d'éléments matériels en interaction continue, mettant en jeu des variables (des paramètres, des facteurs) à la fois spatiales, temporelles, matérielles et énergétiques .

La Géologie est encore loin d'avoir exploré le complexe : espace-temps-matière-énergie, ce qui est son objectif ultime . Cependant, elle se préoccupe depuis assez longtemps d'esquisser les bilans matériels des échanges de toutes natures ; par exemple, lorsqu'un massif granitique se " met en place " dans des terrains sédimentaires ou métamorphiques, que leur emprunte-t-il et qu'introduit-il dans son auréole (zone de transformations concentriques) , son " enveloppe " ?

En ce qui concerne la dimension énergie la Géologie paraît encore au stade des tâtonnements, oscillant entre les applications de la Thermodynamique classique et celles de l'Energétique cristalline ou " réticulaire " [des réseaux cristallins] (arrangements périodiques des atomes et des molécules dans l'espace) .

Le groupe espace-temps représente la Géologie traditionnelle ; le groupe matière-énergie représente à peu près la Géochimie dans son sens le plus large en y joignant la Thermodynamique, mais ces coupures sont quelque peu arbitraires . Retenons seulement que l'on peut plus aujourd'hui pratiquer la Géologie sans utiliser la Géochimie .

Toute matière[et énergies, thermiques, mécaniques, radiatives] est structurée, c'est-à-dire organisée d'une manière plus ou moins complexe . On peut distinguer ainsi des niveaux d'organisation, liés à la notion de continuité et de discontinuité .

Tout système continu, c'est-à-dire d'un seul tenant (ce qui n'est pas séparé, d'une seule pièce) à une certaine échelle, devient discontinu lorsqu'on l'observe dans le détail (à une autre échelle d'investigation) . Par exemple, le corps humain est un système continu, d'un seul tenant, pareillement à un océan ou à une étoile . Mais examiné, investigué à l'aide d'un moyen de grossissement, au microscope, il se révèle discontinu et constitué d'un très grand nombre d'unités analogues entre elles, les cellules, séparées par des étendues de nature différente .

Dans les sciences de la Terre les niveaux d'organisation principaux, du plus simple au plus complexe, sont : l'atome- le minéral- la roche- l'appareil rocheux- la chaîne de montagne[actuelle ou ancienne, et alors reconstituées par un certain nombre de raisonnements] - l'écorce terrestre- les zones concentriques de la planète jusqu'en son centre . A chaque niveau d'organisation, un objet est formé, constitué, par une population d'objets du niveau inférieur .

A chaque niveau d'organisation on peut établir des lois, qui régissent la population d'objets appartenant au niveau inférieur .

Dans l'exemple biologique, les lois de la chimie du vivant, valables à l'échelle moléculaire, ne peuvent pas être appliquées purement et simplement au niveau de l'individu en activité . Ce dernier offre, en plus, des ensembles structuraux autonomes, organisant les phénomènes biologiques . Et l'on ne peut comprendre complètement tout le système " animal " qu'en se plaçant successivement à tous les niveaux .

De la même manière, si nous étudions un ensemble rocheux, nous devrons nous placer successivement à diverses échelles .

D'abord l'échelle du " massif rocheux ", dont nous analyserons l'anatomie ,un massif de granite peut présenter dans sa partie centrale des minéraux à " grains fins " [millimétrique] et à sa périphérie une roche à très gros cristaux [centimétriques] ; cette anatomie qui porte sur des surfaces topographiques (discontinues car cachées par toutes sortes de choses :terre arable, forêts, formations géologiques plus récentes en discontinuité ... ) de plusieurs kilomètres, même de plusieurs dizaines, centaines et même davantage, sera représentée sur des cartes à diverses échelles .
Puis l'échelle du "front de taille " dans une carrière ,ou sur le bord d'une route, échelle à laquelle nous pouvons observer par exemple des orientations de mégacristaux de feldspaths .

Puis celle d'un échantillon de la taille du poing, que nous examinons à l'aide d'une loupe pour en connaître la composition minéralogique ainsi que les relations structurales entre les minéraux ; ce niveau d'examen correspond à peu près à l'histologie des biologistes et à la cytologie des botanistes .

Enfin l'étude plus intime des minéraux constitutifs : par exemple, les zonations à l'intérieur des feldspaths ; les variations de la composition chimique variant de zone en zone, du cœur du cristal vers sa périphérie [à l'aide d'une microsonde électronique] ; la présence d'inclusions fluides ou solides [verres ou micro inclusions minérales piégées lors de la croissance du mégacristal ou formées lors d'une cristallisation interne des liquides magmatiques piégés lors de sa croissance .

Seule l'étude à tous ces niveaux d'organisation, pratiquée sur de nombreux objets, peut commencer à laisser entrevoir des interprétations génétiques .

Si nous utilisons des termes, des mots empruntés à l'étude du monde organique, c'est parce que les mots recèlent une certaine puissance dynamique et qu'ils stimulent la pensée lorsqu'on les transpose d'un domaine de la science à l'autre .

A chaque niveau d'organisation et spatial correspondent des méthodes et des techniques différentes . Le géologue étudie des objets ou des systèmes qui vont en général de quelques micromètres ( quelques millionièmes de mètres) [par exemple les inclusions fluides dans les minéraux] aux milliers de kilomètres ; de l'épaisseur d'une couche ou d'un filon aux fosses marines de milliers de kilomètres de longueur et de 100 km ou plus de largeur . Sa profondeur d'investigation ne dépasse guère, dans les masses continentales les plus profondément érodées, 20 ou 30 km . Il étudie donc l'écorce terrestre à des échelles variées .

Le géophysicien se donne pour objet d'étude la Terre entière, dont il veut connaître les caractéristiques physiques et les surfaces de discontinuité jusqu'en son centre, c'est-à-dire jusqu'à 6000 km de la surface .

Le minéralogiste travaille à l'échelle du centimètre, du micromètre et de l'angström (dix milliardième de mètre ) , puis cède la place au physicien atomiste .
Il ne faut donc pas s'étonner de rencontrer, chez ces divers spécialistes, des attitudes d'esprit très différentes, à tel point que l'on a parfois l'impression qu'ils n'appartiennent pas à une confrérie (une communauté) dont l'objet commun est de faire progresser les Sciences de la Terre ! Dans cette confrérie disparate le géologue est assez souvent tenu par ses collègues pour un parent un peu " attardé " . L'analyse de cette situation peut tenir en quelques mots .

Le minéralogiste physicien travaille dans des structures fixes et mesurables ; s'il se trompe, c'est avec des chiffres ! Le géophysicien travaille sur des paramètres mesurables : vitesse des ondes sismiques, variations du champ de la pesanteur, variations du champ magnétique ... Il a de plus l' " avantage " de viser le plus souvent à des profondeurs [dizaines, centaines, milliers de kilomètres] auxquelles on ne peut pas vérifier directement ses hypothèses . Dès qu'il travaille aux profondeurs accessibles aux sondages (aux forages pétroliers par exemple) ou aux travaux miniers ses prévisions - facteur essentiel pour tester, non seulement la solidité mais aussi les difficultés d'une science - deviennent très vulnérables . Sa collaboration avec le géologue, en lui demandant quel modèle est le plus plausible pour expliquer le phénomène physique mesuré, évite des erreurs inadmissibles .
Malgré cela on a vu des milliards d'euros engouffrés dans des campagnes de prospection géophysique mal préparées, parce qu'ici " joue la magie du chiffre et des courbes ! "
Par contraste, on " reprochera " plus ou moins explicitement ou confusément, au géologue de ne quantifier (attribuer des valeurs chiffrées à un phénomène) que rarement ses raisonnements, avec l'idée sous-jacente " (implicite, qui est impliqué dans une proposition, un fait, sans être formellement exprimé) qu'il ne sait pas le faire " . Une telle attitude n'est ni très juste, ni très sérieuse . Elle va nous permettre de mettre en évidence, en relief, des qualités nécessaires pour être en mesure d'acquérir des " Savoirs "intuitivement, en utilisant sa propre expérience et d' être capable d'une " Réflexion " efficiente (efficience : faculté de faire, de produire un effet, vertu d'efficacité, de pouvoir ) .

Voici quelques éléments formateurs :

- apprendre comme ont su le réaliser certains géologues des " enchaînements de phénomènes ", ce qui est une véritable science .
- savoir utiliser, comme les physiciens les " mathématiques ", leur formation de " naturaliste " basée surtout sur l'observation et l'interprétation comparative des objets et des phénomènes dynamiques dans l'espace et la durée .
- être capable de reproduire expérimentalement, par synthèse, des objets naturels de la Nature .
- être constamment contraints de confronter les témoignages du passé avec les phénomènes actuels : sédimentation, volcanisme, érosion, transformations de toute nature ... etc.
- être obligé de faire appel aux données de multiples disciplines, leur domaine d'investigation s'étendant sur toutes les échelles intermédiaires entre l'angström et les milliers de kilomètres, ce qui requiert une extension culturelle considérable . Et, ainsi, être capable de" jeter des ponts " entre toutes les sciences de la matière dans l'espace et dans le temps et également dans le champ de toutes les sciences humaines .
- être capable de créer et poursuivre des collaborations humaines multi-disciplinaires dans de très nombreux champs de la connaissance, et ainsi de savoir faire preuve d'esprit critique dans le jugement sur les apports de nombreux spécialistes .
- être capable de comprendre le fonctionnement intellectuel et les types de raisonnements émis par d' autres scientifiques, techniciens , ingénieurs, économistes , médecins , et même politiques ... dans un ensemble de contextes variés .
- être conscient de la relativité des phénomènes, des comportements des êtres humains dans de nombreuses circonstances, et surtout être capable de " jauger " les informations et spécialement celles qui se disent pouvoir " vulgariser " ( répandre des connaissances en les mettant vraiment ou soi-disant à la portée du grand public ; vouloir faire preuve de vulgarisation en vue de manipuler, influencer, téléguider, les esprits [fantasme social de très nombreux individus ou de " groupes dits de pression " ] ; le fait d'adapter un ensemble de savoirs pédagogiques, techniques, scientifiques, sociologiques, politiques, financiers, médicaux, de manière à les rendre accessibles à un " lecteur " non spécialiste ) .
- savoir envisager les faits, les mécanismes, les évolutions de toutes natures, à des échelles de durées de plusieurs centaines de millions d'années et également de quelques secondes, minutes, heures, mois et de quelques années, quelques siècles ... !

Ces qualités essentielles que doit posséder un " excellent Géologue " , [[ que nous pouvons résumer- mais mal - par des mots : intuition, aptitude à la vision dans l'espace,,sens de l'orientation, sens de l'auto-critique, c'est-à-dire du va-et-vient incessant entre l'hypothèse construite (voir l'analyse technique boursière !) , les faits qui la nuancent ou l'infirment, reconstruction d'une autre hypothèse, honnêteté intellectuelle, etc. , ]] doivent être en possession, maîtrisées par tous ceux qui veulent prétendre utiliser les savoirs de toute nature !

Enfin, il ne faudrait pas oublier que l'invention, la découverte de ce qui ne se dévoile pas " aux premiers regards " , est une germination de l'esprit, qui requiert avant tout la quiétude (calme paisible, tranquillité) et ne peut s'accommoder ni de la défense frénétique d'intérêts, ni des incessantes enquêtes et demandes de justifications dont on accable les véritables chercheurs scientifiques ou des autres " champs de la Connaissance " .

Bonnes réflexions et à bientôt, Gerboise .

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