dimanche 28 décembre 2008
Premières clartés du matin : des langages ; les discours et les écrits ; l'expression orale et la communication écrite .
Quand nous exprimons cette pensée (vérité [?] remarquable brièvement énoncée), cette maxime (insiste sur la valeur du fond de la pensée qui peut servir de règle pour un art, une science , et dans la vie pratique) , cette sentence (a surtout rapport à l'expression, sous une forme ramassée, d'une opinion, d'une pensée ou d'une maxime) , cette soi-disant " vérité ", lorsque nous clamons que :
" les paroles s'envolent, mais que les écrits restent ",
c'est souvent pour les déprécier, les rabaisser toutes les deux . Puisque l'écriture est dans cette éventualité une sauvegarde et une précaution contre les excès, les abus que l'on peut faire de la parole par imprudence, par légèreté ou par intention de tromper, de circonvenir (agir auprès de quelqu'un avec ruses et artifices pour le déterminer à faire ce qu'on souhaite de lui) . L'écriture devient alors un artifice de scribe (de greffier, de gratte-papier !) qui ôte ses ailes à la parole et l'enchaîne à la terre . Il ne faut pas passer sous silence les questions de Faust à Méphistophélès (Faust: Poème dramatique de Goethe, 1808, dans lequel Faust, entre Méphistophélès qui s'est juré de le réduire à l'animalité, et Dieu, qui lui laisse les moyens d'assurer son salut par ses seules forces, il apparaît comme le symbole de la condition humaine et de son écartèlement permanent entre le bien et le mal) :
" Quoi, tu me demandes une signature, pédant ? (prétentieux) N'as-tu donc jamais eu affaire à un homme, à la parole d'un homme ? La parole meurt en passant par la plume ."
Cependant, la sagesse de Confucius nous apprend à nous méfier :
" La mémoire la plus forte, la plus intense, dit-elle, est plus faible que l'encre la plus pâle " .
Écrire, rédiger des idées, c'est choisir, opter parmi les possibles en vue de construire du sens, c'est prendre possession de certains d'entre eux, c'est promettre de les réaliser beaucoup mieux que par la parole, le discours, qui reste presque toujours un essai, une tentative, et a besoin de se redoubler et de se confirmer elle-même pour devenir un engagement, une obligation . Quand l'écriture fixe l'instant, c'est toujours pour l'enchaîner à d'autres instants, comme la parole dans le serment : mais la signature est le sceau du serment . Dans cet engagement, cette promesse, cette résolution, la parole apparaît toujours comme ayant un caractère de solennité : elle cesse d'être un jeu (une action, un acte) fugace, fragile . Nous voulons qu'elle nous lie, nous engage . La parole est un acte spontané qui ne peut pas toujours être repris, modifié ; la signature y ajoute un acte nouveau que nous inscrivons dans les choses par lequel nous nous interdisons en effet de la reprendre .
Si l'écriture est une parole qui, au lieu de s'évanouir (disparaître, se dissiper sans laisser de traces) avec l'instant qui l'a produite, se fixe (s'ancre) dans la durée (espace de temps que dure une chose, un événement) , elle est à la parole ce que la durée est à l'instant (moment très court) . Car l'instant de la lecture n'est point le même que celui de l'écriture . De telle sorte que cette écriture qui, malgré le temps écoulé, a franchi sans changement l'intervalle (distance d'un temps ou d'un lieu à un autre) qui sépare les deux instants, a montré par là qu'elle devait surpasser (aller au-delà ...) toutes les préoccupations (ce dont on a souci, ce dont il convient d'avoir du souci, ce qui occupe fortement l'esprit) de l'instant . Car tout ce qui est né de l'instant n'a de sens que pour l'instant et doit périr (prendre fin, disparaître) aussi dans l'instant . Il en est du livre comme des contrats que l'on signe pour s'engager ; et il valait mieux ne rien écrire que de renier (désavouer) aujourd'hui ce que l'on avait écrit la veille, pour recommencer demain une tentative (démarche) aussi vaine, vouée (destinée irrévocablement) d'avance au même sort .
On ne s'étonnera donc pas de la puissance presque surnaturelle que les scribes (employés aux écritures) ont toujours exercée .
Ceux qui écrivent laissent toujours un monument plus durable que ceux qui agissent et qui ont besoin d'eux pour être capables de survivre .
Bien à vous, Gerboise .
" les paroles s'envolent, mais que les écrits restent ",
c'est souvent pour les déprécier, les rabaisser toutes les deux . Puisque l'écriture est dans cette éventualité une sauvegarde et une précaution contre les excès, les abus que l'on peut faire de la parole par imprudence, par légèreté ou par intention de tromper, de circonvenir (agir auprès de quelqu'un avec ruses et artifices pour le déterminer à faire ce qu'on souhaite de lui) . L'écriture devient alors un artifice de scribe (de greffier, de gratte-papier !) qui ôte ses ailes à la parole et l'enchaîne à la terre . Il ne faut pas passer sous silence les questions de Faust à Méphistophélès (Faust: Poème dramatique de Goethe, 1808, dans lequel Faust, entre Méphistophélès qui s'est juré de le réduire à l'animalité, et Dieu, qui lui laisse les moyens d'assurer son salut par ses seules forces, il apparaît comme le symbole de la condition humaine et de son écartèlement permanent entre le bien et le mal) :
" Quoi, tu me demandes une signature, pédant ? (prétentieux) N'as-tu donc jamais eu affaire à un homme, à la parole d'un homme ? La parole meurt en passant par la plume ."
Cependant, la sagesse de Confucius nous apprend à nous méfier :
" La mémoire la plus forte, la plus intense, dit-elle, est plus faible que l'encre la plus pâle " .
Écrire, rédiger des idées, c'est choisir, opter parmi les possibles en vue de construire du sens, c'est prendre possession de certains d'entre eux, c'est promettre de les réaliser beaucoup mieux que par la parole, le discours, qui reste presque toujours un essai, une tentative, et a besoin de se redoubler et de se confirmer elle-même pour devenir un engagement, une obligation . Quand l'écriture fixe l'instant, c'est toujours pour l'enchaîner à d'autres instants, comme la parole dans le serment : mais la signature est le sceau du serment . Dans cet engagement, cette promesse, cette résolution, la parole apparaît toujours comme ayant un caractère de solennité : elle cesse d'être un jeu (une action, un acte) fugace, fragile . Nous voulons qu'elle nous lie, nous engage . La parole est un acte spontané qui ne peut pas toujours être repris, modifié ; la signature y ajoute un acte nouveau que nous inscrivons dans les choses par lequel nous nous interdisons en effet de la reprendre .
Si l'écriture est une parole qui, au lieu de s'évanouir (disparaître, se dissiper sans laisser de traces) avec l'instant qui l'a produite, se fixe (s'ancre) dans la durée (espace de temps que dure une chose, un événement) , elle est à la parole ce que la durée est à l'instant (moment très court) . Car l'instant de la lecture n'est point le même que celui de l'écriture . De telle sorte que cette écriture qui, malgré le temps écoulé, a franchi sans changement l'intervalle (distance d'un temps ou d'un lieu à un autre) qui sépare les deux instants, a montré par là qu'elle devait surpasser (aller au-delà ...) toutes les préoccupations (ce dont on a souci, ce dont il convient d'avoir du souci, ce qui occupe fortement l'esprit) de l'instant . Car tout ce qui est né de l'instant n'a de sens que pour l'instant et doit périr (prendre fin, disparaître) aussi dans l'instant . Il en est du livre comme des contrats que l'on signe pour s'engager ; et il valait mieux ne rien écrire que de renier (désavouer) aujourd'hui ce que l'on avait écrit la veille, pour recommencer demain une tentative (démarche) aussi vaine, vouée (destinée irrévocablement) d'avance au même sort .
On ne s'étonnera donc pas de la puissance presque surnaturelle que les scribes (employés aux écritures) ont toujours exercée .
Ceux qui écrivent laissent toujours un monument plus durable que ceux qui agissent et qui ont besoin d'eux pour être capables de survivre .
Bien à vous, Gerboise .
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