vendredi 16 mai 2008

Premières clartés du matin : Pâquerettes ou l'épanouissement du printemps .

Premier sourire du printemps

Tandis qu'à leurs œuvres perverses
Les hommes courent haletants,
Mars qui rit, malgré les averses,
Prépare en secret le printemps .

Pour les petites pâquerettes,
Sournoisement lorsque tout dort,
Il repasse des collerettes
Et cisèle des boutons d'or .

Dans le verger et dans la vigne,
Il s'en va, furtif perruquier,
Avec une houppe de cygne,
Poudrer à frimas l'amandier .

La nature au lit se repose;
Lui, descend au jardin désert
Et lace les boutons de rose
Dans leur corset de velours vert .

Tout en composant des solfèges,
Qu'aux merles il siffle à mi-voix,
Il sème aux prés les perce-neiges
Et les violettes aux bois .

Sur le cresson de la fontaine
Où le cerf boit, l'oreille au guet,
De sa main cachée il égrène
Les grelots d'argent du muguet .

Sous l'herbe, pour que tu la cueilles,
Il met la fraise au teint vermeil,
Et te tresse un chapeau de feuilles
Pour te garantir du soleil .

Puis, lorsque sa besogne est faite,
Et que son règne va finir,
Au seuil d'avril tournant la tête,
Il dit : " Printemps, tu peux venir ! "

Théophile GAUTIER , 1810-1872, Émaux et Camées, 1853, Fasquelle, éditeur , véritables petits bijoux poétiques, ciselés par un maître de l'art .
Peintre dans sa jeunesse, il a transporté dans la littérature la recherche du pittoresque et de la couleur, et la précision du dessin .

Voici, moins aride, une petite escapade à travers champs . Bien à vous, Gerboise .

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