lundi 10 novembre 2008

Histoire de la langue et de la littérature françaises : 13 - Survol de la deuxième période du XIXe siècle , la Prose [*]

[*] suite du n° 12 du 28 Octobre 2008

A l'exaltation sentimentale, à l'idéalisme, au lyrisme succèdent le réalisme et le positivisme . Sous l'influence de l'esprit scientifique, on se défie de l'imagination, on revient à l'étude des faits, et de là sort le naturalisme .

*) Le roman :

Le roman devient la forme littéraire dominante comme l'avait été auparavant la poésie . Flaubert, le premier, cherche à faire sortir l'émotion du spectacle des choses et patiemment il étudie la vie moyenne comme l'antiquité, dans ses chefs-d'œuvre Mme Bovary et Salambo . Il est de plus un styliste parfait, l'un des maîtres de la phrase française . Les frères Goncourt poussent plus avant dans le naturalisme, mettant avant tout le document, notant des détails et des impressions, créant le style impressionniste . Zola veut fonder sur la science expérimentale une vaste synthèse de la vie moderne ; mais son esprit imaginatif l'entraîne, loin du roman documentaire à de lourdes et puissantes constructions comme Germinal ou l'Assommoir, qui sont de véritables épopées de la vie ouvrière . Alphonse Daudet, dans ses contes et ses romans, a su allier à une observation aiguë une sensibilité délicate, une émotion discrète . Il est touchant et séduisant . Guy de Maupassant excelle à conter avec simplicité la vie telle que son expérience et la nôtre la révèlent . Edmond About est un fin et spirituel conteur . Pierre Loti promène à travers le monde un regard désabusé, riche en impressions pittoresques ; c'est un maître de l'exotisme . Paul Bourget analyse avec profondeur les mobiles de nos actions et Anatole France, ironiste pénétrant, enchante par la magie de son style .

**) L'histoire :

Trois grands noms se détachent, Fustel de Coulanges, l'auteur de la Cité Antique, sait dégager les lois qui ont présidé à la formation des sociétés passées ; son exposé, clair, sobre et vigoureux, est d'une grande puissance . Taine se sert de l'histoire pour la psychologie et la sociologie . Posant que tout est déterminé par la race, le milieu et le moment, il établit l'histoire littéraire ou politique, comme dans sa Littérature anglaise ou les Origines de la France contemporaine, avec un style riche de pensées et d'images . Renan a tous les dons de la pensée et du style . Il s'est consacré surtout à l'histoire religieuse, y mêlant sa conception de l'univers et de la vie, et séparant nettement le domaine de la science et celui de la foi .

***) La vie publique :

La presse compta de grands écrivains : le catholique Veuillot, le libéral Prévost-Par adol, l'indépendant Edmond About. A la tribune de grandes voix retentissent : Thiers, Jules Favre, Jules Simon, Gambetta, à la fin de l'Empire ; Jules Ferry ensuite ; Jaurès et Clémenceau à la fin de cette période, pour ne citer que des talents incontestés .

****) Philosophie et critique :

La philosophie s'illustre des oeuvres de Claude Bernard, Renouvier, Th. Ribot, Taine . Leurs théories influent sur la critique littéraire qui prend une place de plus en plus grande et où on relève les noms de Sainte Beuve finissant, Taine, Sarcey, Brunetière, J. Lemaître,
Faguet .

Considérations philosophiques

" N'est-ce pas un fait étrange que toutes les idées que la science primitive s'était formées sur le monde nous paraissent étroites (sans largeur de vues, sans compréhension ni tolérance) , mesquines (étriqué, qui dénote une grande étroitesse d'esprit et une certaine indigence de l'entendement) , ridicules (dignes de moquerie, dénués de bon sens, absurdes), auprès de ce qui s'est trouvé véritable ? La terre semblable à un disque, à une colonne, à un cône, le soleil gros comme le Péloponèse ( en Grèce) , ou conçu comme un simple météore s'allumant tous les jours, les étoiles roulant à quelques lieues sur une voûte solide, des sphères concentriques, un univers fermé, étouffant, des murailles, un cintre étroit contre lequel va se briser l'instinct de l'infini, voilà les plus brillantes hypothèses auxquelles était arrivé l'esprit humain . Au delà, il est vrai, était le monde des anges, avec ses éternelles splendeurs, mais là encore quelles étroites limites, quelles conceptions finies( limitées) ! Le temple de notre Dieu n'est-il pas agrandi depuis que la science nous a découvert l'infinité des mondes ? ... Disons donc sans crainte que , si le merveilleux de la fiction a pu jusqu'ici sembler nécessaire à la poésie, le merveilleux de la nature, quand il sera dévoilé dans toute sa splendeur, constituera une poésie mille fois plus sublime ."

RENAN, L'Avenir de la Science, [ Calman-Lévy, Éditeur ] .

Bientôt, la poésie et le théâtre de cette deuxième période du XIX e siècle vous seront présentés . A la suite de Victor Hugo : Baudelaire, Sully-Prudhomme, Leconte de Lisle, de Hérédia, ainsi que Verlaine et Henri de Régnier vont transfigurer le siècle . Le théâtre de Labiche va nous transcender. Nous verrons qu'une multitude d'autres personnalités vont imprégner toute cette fin de siècle .

A bientôt, bien à vous, Gerboise .

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